Autour du col du Granon


Grand Lac de l’Oule

2018-08-11, samedi ; Saint Chaffrey (Col de Granon)
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Aujourd’hui, le beau temps est à nouveau au rendez-vous. Nous nous préparons et prenons la voiture pour escalader le col du Granon, 2413 m. La petite route en lacets spectaculaires est un cul-de-sac fréquenté par les randonneurs et les cyclistes. Nous stationnons dans les alpages, bien au-dessus de la limite des arbres.

La randonnée n’est pas bien difficile, mais les paysages valent largement le déplacement. Nous montons jusqu’au col de l’Oule pour redescendre jusqu’au lac du même nom, bijou d’un vert étonnant au milieu d’un écrin de montagnes. C’est le lieu du pique-nique, sur le bord de l’eau, accompagné par les cloches d’un troupeau de moutons paissant par là.

Nous remontons au col menant au lac pour prendre le sentier menant au col de Cibière. Nous visitons quelques casemates hors service, puis nous redescendons tranquillement vers la voiture, admiratifs devant le superbe paysage. Peu après la série impressionnante de lacets négociée très prudemment par Étienne, nous sommes de retour à la maison.

En fin d’après-midi, Étienne accompagne Joseph à un vide-grenier alors que le reste de la famille se rend à pied au village voisin : c’est l’heure de la messe. La petite église est bondée, mais le prêtre a 10 minutes de retard ; sinon, tout se passe très bien, l’assemblée chantant a cappella avec compétence et ferveur.

Après le repas, nous profitons d’une belle soirée guitare et chants avant de nous retirer à tour de rôle pour la nuit.

Val de Susa et Montgenèvre


Exilles

2018-08-10, vendredi ; > Saint Chaffrey (Briançon) – 105 km
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Comme d’habitude, je me lève avant que l’alarme sonne. S’il n’a pas plu cette nuit, la rosée a été bien vigoureuse, et le temps est splendide. Comme j’ai un peu de temps, je fais corriger par l’ordi les trop nombreuses fautes de frappe du journal. Ensuite, déjeuner et préparation, je suis en route peu après 8 h 15.

Première étape : la vallée jusqu’à Susa. C’est facile, car c’est presque plat, et entouré de hautes montagnes. En plus des villages perchés ici ou là, une abbaye du Xe siècle ancrée sur un piton rocheux domine les lieux.

À partir de Susa, où je mange puisqu’il est midi, le programme change : ça monte sérieusement jusqu’à Gravère avant de descendre un peu et de remonter. Le train et l’autoroute alternent entre longs tunnels et petits ponts, alors que je reste au gros et chaud soleil. C’est de toute beauté.

À Exilles, je passe au pied d’un spectaculaire fort médiéval ; le village est à l’avenant. Nouvelle descente vers Oulx, une vallée plus large et industrielle. Dès la sortie du village, la montée reprend, assez facile. Point de vue végétation, je me croirais au Québec, mais les montagnes sont bien d’ici. Que c’est beau !

Cesana Torinesa, le village suivant, prélude aux choses sérieuses. La montée est soutenue, en larges lacets. Je vois la route où je m’en vais, bien au-dessus de moi.

Après un dernier virage en épingle, un tunnel de près de 2 km est interdit aux vélos. Ce n‘est pas indiqué, mais l’ancien tunnel est resté disponible. C’est bien confortable, éclairé par une série d’ouvertures dans la falaise. Tout près de Clavière, dernier village italien, j’entends des voix venues de la falaise : trois jeunes gravissent une via ferrata vertigineuse. Beau terrain de jeu.

De retour en France, je passe le village et le col de Montgenèvre, puis la descente commence vers Briançon. Lacets et émotions garanties, ainsi qu’un paysage magnifié par le soleil qui baisse. J’arrive chez mes amis Étienne et Bénédicte vers 20 h 30. Il y aussi leurs trois enfants Évangéline, 18 ans, Joseph, 11 ans, et Aloys, 6 ans.

Le repas en famille est très agréable. Nous chantons quelques chansons – en plus d’une maman musicienne, Évangéline bénéficie d’une voix superbe qu’elle cultive. Étienne est couche-tard, les autres disparaissent progressivement pour une bonne nuit et je fais de même.

Statistiques
km jour : 102,6
km total : 2287
départ / arrivée : 8: 20 > 20 : 30
temps déplacement : 7 : 57
vitesse moyenne : 12,9
vitesse maximale : 55,6

Torino : entrer et sortir


Torino – Ponte di Sassi, sur le Pô

2018-08-09, jeudi ; > Caselette (Torino) – 100 km
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Cette fois-ci encore, il a plu pendant la moitié de la nuit, mais ma tente et mon matériel sont restés bien au sec grâce à mon hôte. Au matin, je me prépare tranquillement et je suis en route peu après 8 h. Ce matin, c’est assez confortable côté température, mais le ciel reste hésitant et le temps très humide. Comment sera la fin de journée ?

La ville d’Ivrea est bien jolie, mais les indications routières sont moins précises qu’en France ou en Suisse. Je réussis à quitter la ville par le chemin prévu, mais au prix de quelques hésitations.

Jusqu’à Romano, je roule en plaine, mais ensuite débute une bonne montée. Alors que ça semble fini, un virage montre une nouvelle montée. Après un dernier virage, l’explication figure sur un panneau : Paso di Santa Croce, 359 m. Ce n’est pas la plaine…

La descente à partir de Montalenghe est bien agréable, et ensuite c’est vraiment la plaine. En chemin, une équipe s’affaire à débarrasser les fils électriques d’un gros arbre tombé hier, et il y a d’autres dégâts. Ça a cogné dur.

Ensuite, la route est sans histoire jusqu’à Chivasso et le pont du Pô, le fleuve de la région. D’une bonne largeur, il est bien brun à la suite des récents orages. Je le longe par sa rive sud, moins urbanisée. À Gassino, une piste cyclable. C’est joli, calme, mais le gravier règne. Je la quitte à St Mauro.

En cherchant mon chemin, je constate que la conduite du vélo change : crevaison arrière, la première du voyage. Un éclat de roche bien acéré s’est logé dans mon pneu. La réparation est facile, mais demande de décharger complètement le vélo, de l’installer à l’envers et de prendre du temps, évidemment.

De retour sur la route, je me retrouve devant deux options aux allures d’autoroute. Un cycliste arrive et me guide en français. Des pistes cyclables suivent les deux rives du Pô. J’essaie la piste nord, mais elle se perd le long d’un affluent du fleuve et risque de me mener un peu trop en ville. Je reviens vers la piste sud.

À la suite de ma crevaison, mon pneu arrière est un peu mou, Une affiche indique une boutique de vélo. Même si nous sommes à l’extérieur des heures, le patron m’ouvre et gonfle mon pneu le mieux possible. Il a conçu deux modèles de vélos électriques qu’il fait fabriquer en Chine et vends ici. Nous discutons itinéraires : il me suggère le Val de Susa et un itinéraire pour traverser Torino.

Cet itinéraire semble assez facile, mais il y a très peu d’indications aux intersections. Je visite des grandes avenues, des zones commerciales, des quartiers plus modestes, sans savoir exactement où je suis. Grâce aux généreuses explications des passants – en italien, avec parfois des bribes de français et d’anglais –, je finis par sortir de la ville par une quasi autoroute bien stressante mais qui me mène à la bonne route. Entre temps, une petite averse bien prévisible a peut-être donné un avant-goût de la soirée.

Ensuite, c’est plus simple côté orientation, mais la circulation est dense. J’arrive enfin à la campagne. Selon ma carte, il y aurait un camping à Caselette, le dernier avant un bout de temps. Après 100 km et sous un ciel toujours menaçant, je juge que c’est bien raisonnable de m’arrêter maintenant.

Le camping propose un minuscule chalet, à peine plus grand que ma tente. Pour 9 € de plus, il offre le confort en cas de pluie, une tente garantie sèche, une installation rapide, une table à pique-nique et l’électricité. Un bon investissement pour ce soir.

Marc, un français réservé qui voyage avec voiture et vélo, m’accueille très gentiment. Après douche, repas et vaisselle, je jase avec Jordi, mon voisin de Barcelone qui randonne un peu partout avec sa femme et trois jeunes enfants. En face, une famille espagnole avec un tout-petit ; leurs voisins, deux jeunes français, puis trois néerlandais : le camping est vraiment international, même si les italiens sont nombreux.

Côté météo, surtout du vent, avec à peine quelques gouttelettes, alors j’écris mon journal dehors, sur la table à pique-nique. Comme Jordi a une pompe à vélo, je peux mettre mes pneus à la pression requise. Ensuite, j’entre « chez moi » pour trier les photos, un bon travail. Quand je me couche, il n’a toujours pas plu, le vent s’est calmé et je suis très heureux d’avoir complété mon travail.

Statistiques
km jour : 99,3
km total : 2184
départ / arrivée : 8: 10 > 17 : 30
temps déplacement : 6 : 13
vitesse moyenne : 15,9
vitesse maximale : 46,6
Camping : 22,00 €

Le Val d’Aoste


Bard – Forte di Bard

2018-08-08, mercredi ; > Ivrea – 70 km
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Il a plu pendant la moitié de la nuit, alors mon double toit est trempé ce matin. Heureusement, l’eau n’entre pas dans ma tente quand elle est bien montée, mais rien ne sèche dans cette atmosphère chargée d’humidité.

Debout à 6 h, je suis en route une heure plus tard. Les quelques cyclistes ou coureurs qui m’ont vu en passant n’ont pas semblé étonnés, ils m’ont simplement salué.

Le ciel est pratiquement dégagé, et le soleil fait naître des volutes de vapeur quand il darde ses rayons sur la végétation. C’est très joli.

La piste cyclable, excellente, longe le fleuve Dora Bàltea sur quelques kilomètres, puis s’en éloigne pour contourner une réserve faunique avant de se terminer. Je déjeune dans un petit village où de délicieuses sources fraîches coulent un peu partout.

Il s’agit maintenant de me procurer une carte de la région. À la station service, une carte du Piemonte est disponible. C’est parfait, même si jusqu’ici j’ai suivi la seule route existante, puisque je suis dans une profonde vallée.

C’est vraiment magnifique. La rivière, brune et rageuse à cause des pluies récentes, coule au fond de la vallée. Tout autour, selon l’espace disponible, villages, cultures et infrastructures – route, autoroute, train, canaux d’irrigation – sont disposés au mieux. Plus haut, de petits villages sont accrochés un peu partout avant de laisser se dresser d’immenses murs de pierre aux sommets découpés.

Comme la région est fréquentée depuis longtemps, ont y croise régulièrement des châteaux fortifiés du Moyen-Âge, et même quelques infrastructures romaines.

Trois cyclistes me rejoignent, les mêmes qui montaient le col hier matin. Simone, Enrico et Nicoló sont partis de Genève il y a quelques jours et rentrent à la maison ce soir. Belle rencontre, à nouveau, avec ces trois jeunes hommes.

Parfois, la vallée étroite devient un défilé où la rivière coule dans une gorge. Le rail et l’autoroute gèrent ces obstacles avec une série de tunnels. Entre Châtillon et St Vincent, ma route monte et offre de splendides vues.

Plus loin, à Bard, la route contourne le rocher où trône une splendide forteresse. Avec le pont romain, l’ensemble vaut le coup d’œil. Certains petits villages bien typés, dont Donnas, sont ravissants.

Deux remarques sur le Val d’Aosta. Le français y est très présent, devançant parfois l’italien. Plusieurs le parlent, et il s’affiche fièrement. Ça me donne l’impression d’une forme d’affirmation régionale. Aussi, je trouve de temps en temps des indications pour la Via Francigena. Cet itinéraire conduit les marcheurs de la cathédrale de Canterbury, en Angleterre, jusqu’à celle de Rome, au Vatican. Axe de communication majeur au Moyen-Âge, il vient d’être réhabilité et attire déjà les pèlerins – j’avais croisé au col un jeune allemand en route pour Rome.

Je ne m’ennuie pas, mais je sens la fatigue et la chaleur – 34°, selon mon équipement ; 38° selon une enseigne. En tout cas, c’est chaud. Je souhaite une douche et du repos, donc un camping. Sur ma carte, il y en a trois autour de Ivrea alors qu’il faudrait dépasser Torino pour les suivants. Je choisis Ivrea.

Avant d’entrer en ville, je prends la côte à gauche et je suis les indications jusqu’au bout d’un tout petit chemin et d’une allée de gravier. J’ai un doute. Effectivement, le camping est fermé. Il reste une miellerie et une auberge, mais le patron, dans un excellent français, m’invite à planter ma tente et à profiter des installations sanitaires.

Je monte la tente, qui a grand besoin de sécher – c’est vite fait –, et je passe à la douche. L’endroit est calme, parfait, mais infesté de moustiques. Je m’installe donc dans ma tente pour écrire, malgré les 35° qui y règnent. C’est moins pénible que ces bestioles. À l’heure du repas, je constate avec plaisir que les moustiques sont en pause.

Vers 20 h, scénario connu, ça se met à gronder à l’étage supérieur. Peu après, mon hôte m’interpelle : « Aie, le canadien, l’orage s’en vient. Veux-tu mettre ta tente sous la véranda ? Sous un arbre, ce n’est pas très bon. » « L’arbre, c’était pour le soleil. C’est une excellente idée, j’espère avoir le temps… »

Je procède le plus vite possible, et tout est déménagé alors que tombent les premières gouttes. Quelques secondes plus tard, l’orage se déchaîne : forte pluie, gros vent, éclairs, tonnerre, la totale. La vérandai fait son œuvre, je reste au sec et, surtout, en sécurité. Je prends des notes pour demain soir…

Afin de bien dormir, je rentre quelque minutes afin de remercier mon hôte si prévenant. Jean-Pierre – sa mère était française – et sa femme tiennent un gîte selon la formule agrotourisme et sont en même temps apiculteurs. Le monde est bon.

Il est 22 h 00, je me couche accompagné du bruit de la pluie qui se transforme tranquillement en une série d’averses.

Statistiques
km jour : 72,2
km total : 2085
départ / arrivée : 7: 00 > 15 : 30
temps déplacement : 4 : 52
vitesse moyenne : 14,8
vitesse maximale : 44,7

Le Grand-Saint-Bernard


Au col

2018-08-07, mardi ; > Aoste – 100 km
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Mon très sympatrique coloc se lève tôt et prend la route aux premières lueurs, un peu avant 6 h. Comme je suis éveillé et que j’ai de l’électricité pour l’ordi, je décide de terminer la mise à jour du journal. À 7 h, c’est chose faite. À 7 h 45, je suis en route sous un ciel bien dégagé. Scénario connu…

Tout de suite, la montée est solide, et le paysage de toute beauté. Plus je gagne en altitude, plus c’est beau, et je sais que je monterai une bonne partie de la journée.

Quelques cyclistes grimpent légers pour redescendre en vitesse, mais je suis presque seul avec bagages. Trois jeunes avec sacs arrières seulement montent rapidement – par rapport à moi –, et c’est tout. Jusqu’au sommet.

Juste avant l’intersection vers Orsières et Champex-Lac, des ouvriers achèvent le ménage après les débordements d’hier. De gros cailloux, du poids d’une voiture, de petits cailloux, et beaucoup de boue ont recouvert la route quand le torrent a débordé… d’enthousiasme, à la suite des orages.

À Liddes, une averse. Comme il est temps de manger, je m’abrite devant un garage et laisse tomber le gros de l’eau. Pas de problème.

À Bourg-St-Pierre, le soleil est revenu. Je remets de la crème solaire, puis la route entre sous un pare-avalanches, un presque tunnel – une face est ouverte, vers la vallée – de 6 km. Elle monte vers le barrage des Toulles puis le long du lac homonyme, offrant de multiples vues.

Lors d’une pause, une voiture s’arrête hors route, à côté de moi. D’où vient-elle, avec sa plaque marquée TR ? John, anglais, et Nadejda, bulgare, sont partis d’Istanbul, en Turquie, avec ce véhicule de location. Pour le moment, ils se dirigent vers l’Angleterre en faisant de nombreux détours, mais ils disent viser le Japon. À voir. En revanche, ils sont très gentils et m’offrent deux verres d’un excellent jus de fruits, boisson que je ne transporterais évidemment pas.

La route est couverte jusqu’à l’entrée du tunnel. J’émerge donc pour les six derniers kilomètres de montée, les plus abrupts. Le défi est de taille, les lacets se succèdent, mais c’est spectaculaire. Heureusement, il y a peu de circulation et les gens sont prudents quand ils passent à ma hauteur, une bonne idée avec cette route acrobatique.

Juste avant le sommet, un cycliste avec bagage léger me rattrape et nous l’atteignons à quelques instants d’intervalle. Patrice a quitté Bourg-en-Bresse hier, a dormi à Chamonix, et a donc gravi trois bons cols aujourd’hui : les Montets, La Forclaz (descente jusqu’à Martigny) et le Grand-Saint-Bernard. Tout un cycliste ! Dans mon cas, j’ai monté 47,8 km à une vitesse moyenne de 8,3 km/h. Avec les pauses, j’y ai mis près de 9 heures.

Après les photos d’usage, il me suggère de passer par Turino, car la météo s’annonce douteuse en montagne pour les prochains jours. René, un bénévole de l’Hospice, confirme la chose, appuyé par un ciel gris de plus en plus menaçant.

Alors que j’amorce la descente, la pluie passe à l’offensive. Elle est drue, glaciale, parfois mêlée de grêle. C’est, disons-le, inconfortable. Je descends le plus rapidement possible dans les circonstances, renonçant presque à photographier un paysage encore plus extraordinaire que celui de la montée. Bref, je m’enfuis.

Plus bas, la pluie cesse et la température devient un peu plus clémente. Je considère très sérieusement la suggestion de Patrice. Décision prise : ce sera Turino. Je profite aussi de cette descente exceptionnelle pour installer ma caméra sur le vélo et filmer. Je rejoins Aosta sans difficulté, réussissant même à réchauffer mes doigts.

Depuis le sommet du col, je suis en Italie, un pays dont je ne connais pas la langue. Je réussis quand même à comprendre les explications me menant à l’essentielle épicerie.

Ensuite, le camping. Je descends jusqu’à la rivière. Il y a un camping, mais il est fermé. Un homme m’indique où trouver de l’eau et un autre camping. Pour l’eau, ça va, mais en fait de camping je ne trouve qu’un dépotoir. Pas idéal.

Une piste cyclable longe la rivière. Je la prends. Devant moi, une masse grise s’avance. Pluie ou brouillard ? Il est tard, je plante ma tente en vitesse à quelques mètres de la piste, près d’une rangée d’arbres, et je m’y réfugie au plus vite. J’ai à peine le temps de manger avant que la nuit soit totale. Je me couche, et bientôt la pluie commence, forte. Est-ce que c’est pour quelques heures ou pour quelques jours ? Sujet palpitant de méditation nocturne.

Statistiques
km jour : 99,4
km total : 2013
départ / arrivée : 15: 05 > 18 : 45
temps déplacement : 12,3
vitesse moyenne : 12,3
vitesse maximale : 55,7

Les hauts et les bas


Lac des Dix

2018-08-06, lundi ; > Martigny – 40 km
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La nuit, en montagne, nous profitons de la fraîcheur et du calme. J’ai donc très bien dormi. Le matin est rayonnant quand nous nous levons, mais la canicule sévit sur l’Europe, avec des températures anormalement chaudes. Ici, nous sommes protégés des pires effets.

Au programme ce matin, une autre petite virée en voiture. Nous descendons d’abord pour voir de près les pyramides d’Euseigne, un étonnant phénomène géologique. Sur une moraine très friable, quelques cailloux ont protégé de l’érosion le sol les supportant, et se sont ainsi retrouvés au sommet de colonnes pointues, tout le reste ayant été lessivé.

Le site est évidemment protégé, mais un militaire a déjà manifesté son génie en en visant une à titre d’entraînement pour l’artillerie… Bravo, champion.

Pendant que j’admire le paysage, François-Xavier part à la recherche de ses clefs de voiture. Il les avait en arrivant, évidemment, mais où sont-elles ? Dans ses poches ? Dans ses sacs ? Dans la voiture ? Dans l’herbe ? Non… Finalement, je les retrouve sur un banc, à 3 m de là. Nous pouvons repartir.

Nos repartons vers les hauteurs. Ici, les routes sont un exploit du génie humain, et celle-ci en est un bon exemple. De flancs de montagne en lacets, nous grimpons rapidement et prudemment sur un étroit ruban noir où souvent deux voitures ne peuvent se croiser.

Nous atteignons le pied de la Grande Dixence, un monumental barrage hydroélectrique. Plus de 100 km de tunnels acheminent de l’eau depuis les vallées aux alentours via une quarantaine de captages et plusieurs usines de pompage. Avec ses 285 m, presque la hauteur de la Tour Eiffel, il ferme une vallée étroite.

Un téléphérique nous emmène en haut profiter du paysage et du temps magnifique. À bord, Louis, sympathique cyclotouriste, est le premier québécois que je rencontre depuis que j’ai quitté l’aéroport.

François-Xavier et moi longeons d’abord la rive ouest, seule accessible par une série de tunnels creusés à même la falaise. Entre les tunnels, les points de vue sur les montagnes, les glaciers et le lac sont fabuleux. Nous revenons vers la crête du barrage avant de redescendre, car le temps est court. Je serais resté longtemps à explorer cet environnement exceptionnel.

Nous redescendons au chalet où nous attendent Bernard, frère de François-Xavier et avec qui il partage aussi la maison de Sion, et Albin, un ami. Le repas concocté par frérot est excellent, tout comme les conversations. Mais le départ est proche.

François-Xavier et moi redescendons en plaine, passant de 24° à 35°. Ouf ! Je me prépare et je prends la route vers 15 h.

Rapidement, je traverse le Rhône et roule sur sa rive sud, d’abord sur route puis au milieu des arbres fruitiers et des vignes. C’est chaud, brumeux, magnifique et venteux, de face. Plus j’approche de Martigny, plus le vent forcit et plus les nuages s’assombrissent, accompagnés de quelques coups de tonnerre. Puis les nuages sont partout.

En entrant en ville, je visite une arène romaine, et arrive une averse : je me mets à l’abri à côté d’une fontaine. En reprenant la route, un panneau indique que le col et le tunnel du Grand Saint-Bernard sont fermés. Des orages violents ont provoqué un débordement de rivière.

Je suis déterminé, mais pas téméraire : je me dirige rapidement vers le camping local où je choisis l’option dortoir. Après le repas et la douche, la pluie forte commence pour plusieurs heures.

J’accueille mon coloc de ce soir, un colosse aux cheveux très courts et à l’abondante barbe en broussaille. Johannes est parti de l’Autriche, son pays, depuis trois mois et il marche par les montagnes jusqu’à Cannes. Ce n’est pas son premier voyage : passant par la Russie, il s’est déjà rendu à pieds à Jérusalem et en est revenu de la même manière. Il est également écrivain, ermite et prêtre. Tout un personnage !

En soirée, en écoutant la pluie tomber à verse, je m’attelle à la mise à jour mon journal, bien négligé ces derniers temps. Quand mon collègue se couche, je migre au salon alors que la pluie cesse pour un temps. À mon retour à la trop chaude chambre, je devine quelques étoiles et je m’installe sans bruit.

Statistiques
km jour : 38,1
km total : 1913
départ / arrivée : 15: 05 > 18 : 45
temps déplacement : 2 : 28
vitesse moyenne : 15,4
vitesse maximale : 38,2
Camping : 24 Fr

Messe, bisse et petites fleurs


Chapelle Notre-Dame-du-Bon-Conseil

2018-08-05, dimanche ; Mayens de Sion (Sion), Tyon
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Après pareille journée, la nuit a été excellente et appréciée. En revanche, il faut se lever et ne pas traîner ce matin : François-Xavier préside la messe et je m’occupe de l’animation musicale. Après le déjeuner et les préparatifs, nous nous mettons en marche, puisque la chapelle Notre-Dame-du-Bon-Conseil est plus facile d’accès à pieds qu’en voiture.

La chapelle elle-même est bien jolie mais minuscule. François-Xavier préside donc dehors, sous le porche, alors que l’assemblée plutôt nombreuse et de tous âges est assise au pied des immenses mélèzes qui forment une cathédrale naturelle sous le ciel bleu.

Ma guitare est bien petite pour un tel lieu, mais les chants sont visiblement appréciés de l’assemblée. Après la messe, les gens restent longtemps à bavarder sous les arbres.

Au midi, nous deux sommes invités au chalet de Françoise, une bénévole fort impliquée. En chemin, nous croisons deux randonneurs âgés, Alain et Anne-Marie. Lui a été diplomate à Ottawa et ils étaient très amis avec la famille Trudeau à l’époque où Pierre-Éliott était premier ministre du Canada.

Notre hôtesse est une grande dame, plutôt aristocratique, mais énergique et ouverte. À l’apéro, les voisins, Pia et Thierry, de Zurich, se joignent à nous avec leurs deux petites filles Ottilia et Isabel, Hélène, jeune fille au pair et Nicolas, un neveu. Belle troupe, belle rencontre.

Pour le repas, la table est élégante, la nourriture excellente et les conversations variées et passionnantes. Nous restons bien plus tard qu prévu.

En après-midi, François-Xavier et moi partons marcher le long du bisse de Vex. Ce système d’irrigation séculaire apportait l’eau des torrents vers les coteaux par des canaux presque horizontaux installés au flanc des montagnes.

Contrairement à bien d’autres, ce bisse a été réhabilité et accueille de nombreux promeneurs pour une marche en altitude facile et ombragée. En prime, des paysages époustouflants. Nous marchons jusqu’à Oyonaz et revenons récupérer nos effets au petit café où nous les avions laissés.

Toujours à pieds, nous rejoignons la voiture et montons jusqu’à Tyon, une station de sports d’hiver. Ici, ce sont aussi les vues qui nous attirent, malgré le brouillard et les nuages de plus en plus présents. Elles sont au rendez-vous, mais la surprise est de retrouver une végétation très semblable à celle du Québec, incluant les épilobes, magnifiques fleurs violettes, et des bleuets – myrtilles, ici – prêts à être dégustés.

En redescendant, petit détour pour voir de loin les pyramides d’Euseigne, une étonnante curiosité géologique. Tout aussi étonnantes sont les couleurs du ciel qui, éclairé par dessous les nuages, vire à l’orange en colorant tout le paysage. En même temps, des orages s’approchent, mais passent ailleurs.

De retour au chalet, c’est un repas simple et savoureux, puis une courte soirée. Quand François-Xavier se couche, je m’occupe de trier les photos du jour avant de m’installer pour une autre nuit s’annonçant excellente.

Marathon


Le Rhone au pont d’Evionnaz

2018-08-04, samedi ; > Mayens de Sion (Sion) – 175 km
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Excellente nuit, à peine troublée par quelques feuilles froissées par les biches. Je me lève tôt et prends la route avant 7 h 30. Je sais déjà que je commence une grosse journée.

En quittant mon camping improvisé, j’amorce une descente à près de 50 km/h et en deux minutes je me retrouve en Suisse, sans avoir remarqué le moindre panneau marquant le passage. C’est le changement de la signalisation vélo qui m’indique l’événement.

D’abord en campagne, puis en banlieue, puis en ville, je roule vers le lac Léman, une affaire de plus de 25 km. Je déjeune donc au bord de l’eau, en plein centre de la ville. Le panorama est bien joli, ainsi que les mannequins – enfin, des gens qui en ont l’apparence – qui font leur jogging.

Je repars et je longe plus ou moins la rive du lac. Il y a parfois des percées, mais ce sont généralement les propriétaires de ces riches maisons qui bénéficient du panorama. Je repasse en France – cette fois-ci, c’est indiqué – et poursuis vers Yvoire avant un coude de la rive et des routes souvent pas mal encombrées. Suivre l’itinéraire vélo n’est pas toujours évident.

Autour de Thonon-les-Bains, la circulation atteint son paroxysme. À partir de Évian-les-Bains, il n’y a plus que la route principale, car la montagne est de plus en plus proche du lac. C’est de plus en plus beau. À St Gingolph, retour en Suisse et route au pied des falaises.

Je ne suis plus très loin de l’estuaire du Rhône. À partir d’ici, je roule sur un itinéraire cyclable, et presque toujours sur la digue du fleuve. Comme les impressionnantes montagnes suisses encadrent l’ étroite plaine, les paysages sont de toute beauté. En prime, je bénéficie d’un bon vent de dos, gracieuseté des violentes thermiques qui se développent en fin de journée avec la canicule qui sévit toujours. Le brouillard est assez dense pour ressembler à de la pluie qui avancerait derrière moi.

À St Maurice, la vallée se rétrécit jusqu’à devenir un étroit goulot. J’y croise une joyeuse famille voyageant à vélo avec de jeunes enfants, dont un bébé.

J’avance toujours de mon mieux, voyant les heures et les kilomètres s’accumuler. Je prends une bonne collation dans le coude du Rhône, juste au pied d’une paroi où s’exercent des alpinistes chevronnés.

C’est sans histoire, mais toujours au milieu de fabuleux paysages de montagnes, que je rejoins Sion après près de 175 km et 13 heures. Quand je retrouve mon ami François-Xavier, la fatigue s’estompe rapidement.

Après une douche spécialement appréciée, une visite de la maison et un petit tri de mon bagage, nous partons pour la montagne, mais en voiture cette fois-ci. En chemin, nous arrêtons à un petit resto panoramique pour de savoureuses raclettes, puis nous rejoignons le petit chemin de terre qui mène au chalet.

Il faut marcher 300 m avec nos lampes pour enfin entrer dans ce petit bâtiment rustique, charmant et parfait pour sa fonction. Nous ne veillons pas tard…

Statistiques
km jour : 173,7
km total : 1875
départ / arrivée : 7: 25 > 20 : 35
temps déplacement : 9 : 37
vitesse moyenne : 18,0
vitesse maximale : 48,1

ViaRhôna


Usinens

2018-08-03, vendredi ; > La Joux (Genève) – 105 km
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C’est toujours très agréable d’être avec mes amis, alors il est 10 h et il fait déjà très chaud quand je fais mes premiers tours de roues. Je contourne Le Tremblay, un petit hameau dont le nom me dit vaguement quelque chose, avant une bonne descente vers le lac du Bourget. Un cycliste me guide vers le trajet que je suivrai tout au long du lac.

Jusqu’à Aix-les-Bains, c’est une piste cyclable magnifique et fréquentée, parfois à quelques centimètres au dessus du niveau de l’eau. Celle-ci, toujours turquoise et transparente, est très fréquentée par les baigneurs.

Après la ville, ça se passe sur route. Elle est impressionnante : c’est un simple balcon qui surplombe l’eau de 2 m environ. Le train est habituellement confiné dans son tunnel.

Au bout du lac, je bifurque vers un itinéraire que je ne connais pas mais qui, longeant un joli canal, me mène à la ViaRhôna. Souvent sur piste agricole, parfois sur route, le trajet est facile et agréable. Je croise le Fier, un torrent que j’avais remonté par ses gorges lors d’un passage précédent.

Un peu après Seyssel, les choses se corsent. Alors que la chaleur est à son maximum – près de 40° –, j’entame une longue montée sur les petits rapports. Surtout dans les cultures, mais parfois en croisant des villages, la piste rejoint un plateau vallonné. À part un croisement un peu serré avec un motocycliste téméraire, c’est assez agréable, même si je bois de grandes quantités d’eau.

En approchant d’un mur de montagnes, je rejoins quatre jeunes cyclistes voyageant très légers sur des vélos parfois rustiques. Nous nous recroisons plusieurs fois pendant la descente qui mène au défilé de l’Écluse. Ici, le Rhône passe par un étroit passage entre d’impressionnantes parois rocheuses. C’est de toute beauté.

À la sortie du défilé, les quatre comparses regonflent des pneus quand une valve de détache. La chambre à air est finie. Ils en ont une avec eux, mais j’ai les outils et l’expérience, alors je fais la réparation. Nous échangeons des coordonnées, nous prenons des photos et nous roulons ensemble avec l’idée de dénicher un camping commun. Une soirée avec Levon, Karen, Thibault et Pierre me semble être une bonne idée, mais malheureusement ils ratent une intersection sur la piste cyclable et j’y continue seul, puisque c’est le chemin pour Genève.

La journée avance, il est temps de trouver où planter la tente. Juste après Joux, un petit bois, un emplacement parfait, même s’il est très près de la route. Je m’arrête. Je mange d’abord, puis je reçois avec plaisir un appel de mon amie Claire. Il fait pratiquement noir quand je monte la tente et m’y installe pour la nuit. Il y a quand même un peu de trafic dans le bois : les biches y gambadent allègrement. Gambadez ! Je dors.

Statistiques
km jour : 107,5
km total : 1702
départ / arrivée : 10: 00 > 20 : 15
temps déplacement : 6 : 42
vitesse moyenne : 6,0
vitesse maximale : 58,1

Étrange jardinier et cabrioles


Bourdeau – le château

2018-08-02, mardi ; La Motte-Servolex (Lac du Bourget)
Sommaire


Après la chaude nuit, heureusement tempérée par une fenêtre grande ouverte, je me lève encore un peu fatigué de la grande journée d’hier. La chaleur semble installée pour plusieurs jours encore.

Ce matin, Fabien et moi nous rendons chez M. Gilbert, qui habite à la limite de La Motte-Servolex et de Chambéry. Ce vieux jardinier et polémiste ne jure que par le bio, qu’il pratique furieusement dans un jardin en apparence désorganisé tout en maugréant contre « le système ».

C’est un homme très seul et Fabien a un rôle de travailleur social plus encore que d’aide jardinier. En revanche, la production est savoureuse. En particulier, je cueille des figues fraîches en haut d’une échelle branlante. C’est inconfortable, mais c’est un vrai délice.

Au retour, nous apprenons que Wandrille, que j’avais rapidement salué ce matin, est parti sans préavis pour un bout de vacances, ayant déniché un transport de dernière minute. On se retrouvera une autre fois.

Après le repas du midi, nous partons à quatre pour le bout de la route sur la rive ouest du lac du Bourget. Après avoir longé les plages envahies, nous terminons le trajet à pieds, puis à la nage, pour aller sauter des falaises.

Comme c’est un jeu peu compatible avec mon vertige, je me contente de prendre des photos en mode rafale. Parmi elle, certaines sont splendides alors que Fabien et Arthur se lancent dans le vide avec enthousiasme.

Au retour, je procède au tri des photos du jour : j’en efface près de 600, ne gardant que la centaine de meilleures – vive le mode rafale ! Après le repas, la soirée est tranquille, et nous chantons un peu avec la guitare. Les garçons apprécient, mais participent peu car ce ne semble pas être trop de leur âge ni de leur culture. Avant de me coucher bien au chaud, je prépare une mise à jour de ma page Facebook. Comme la journée de demain s’annonce costaude, je profite d’une bonne nuit.