Après un premier départ et un retour imprévu, je reprends mon voyage.
Même aujourd’hui, il pleut jusqu’en mi-journée. Pas de problème, j’ai un visiteur : Samuel, avec qui nous avions descendu le Saguenay en kayak plus tôt cet été, vient récupérer sa voiture puisqu’il avait ensuite pris son propre chemin. J’en profite pour m’informer de son voyage. Parti à vélo de chez ma sœur Monique, il est revenu à Montréal en passant par Chibougamau et Val-d’Or. Ce n’était pas son plan initial, mais il est très content. Belle virée, vraiment.
Il est donc 14 h 30 quand je pars. Le début du trajet est identique à la première étape du 23 juillet : je longe le Saint-Laurent de Dorval jusqu’au Pont Samuel-de-Champlain. En chemin, je croise Isabelle, collègue enseignante. Particularité du trajet, il y a un fort vent de dos, alors ça roule vite sans grand effort.
Après le pont, je longe toujours le Saint-Laurent, mais sur l’autre rive. J’arrive facilement chez mes amis Jean-Pierre et Diane. Comme toujours, nous passons d’excellents moments ensemble et avec leurs enfants, maintenant jeunes adultes.
En soirée, je fais quelques ajustements sur le vélo de Diane, puisqu’elle pédalera de Gatineau à Montréal ce dimanche. Nous ne nous couchons pas trop tard, car tous ont prévu une bonne journée demain.
En 2020, chacun explore son coin de pays, puisque les voyages lointains sont contrindiqués pour cause de pandémie. Après un voyage A interrompu, je repars. Même tout près de chez soi, l’imprévu est au rendez-vous.
Il a eu une belle averse cette nuit, mais ce matin le ciel est au dégagement. Nous nous préparons tranquillement et prenons la route à trois. Trajet sans histoire, avec un petit arrêt pour du matériel pour minou.
Chez moi, tout est en ordre. Si la tendance se maintient, je serai bientôt de retour sur deux roues. Même si ce n’a pas été notre choix, j’ai bien apprécié ce temps en famille avec mon frère.
L’entre-deux
Il n’était pas prévu que je passe quelques jours à la maison. Je reprends un peu le rythme des vacances, sans vraiment défaire mes bagages puisque j’ai bien hâte de repartir.
Vendredi. Je complète le journal de la première partie du voyage, et prépare les chants pour dimanche.
Samedi. Un premier tour de vélo, question de valider que je suis… valide. Succès. Un deuxième tour de vélo afin de faire vérifier le problème de changements de vitesse. Nick, mon mécano, constate que c’est le câble qui est brisé, une réparation assez longue et complexe. Succès aussi, je serai en mesure de reprendre la route bientôt.
Dimanche. Messe aux Floralies LaSalle avec Alain, Adélaïde et Yvan, filmée par Bruno. Nous étions souvent allés à ce CHSLD violemment frappé par la pandémie. Les autres fois, nous nous étions dehors dans la cour avec micros et système de son, mais cette fois-ci il pleut et le virus n’est plus présent alors nous sommes dans la grande salle. Pour la première fois, nous voyons ces gens que nous visitons depuis le début de mai. Émouvant.
Lundi. J’aurais aimé partir ce matin, mais les restes de l’ouragan Isaias vont submerger le Québec dans les prochaines heures. Pas bien bon pour le vélo… Je me lance donc dans de petits bricolages à la maison. Malgré une tournée des boutiques, je ne trouve pas le deuxième cuissard dont j’aurais besoin pour voyager : le vieux, fini, devra reprendre un peu de service.
Mardi. Tranquille, confiné par le déluge, je poursuis les petits bricolages. Et demain, après la pluie, je pars. Enfin.
Dernière nuit chez Gaétan. Comme il ne serait pas prudent de reprendre tout de suite le vélo, il viendra me conduire chez moi. Très apprécié.
Il fait très beau ce matin, alors nous choisissons de gravir le Cap Scotch, près de Piopolis. C’est une balade facile et agréable avec ses jolis points de vue.
Bricolage du jour : les panneaux autour du spa tenaient par des broches et ne tiennent plus à grand-chose. Nous prenons les mesures et allons acheter les vis requises. Fin des bricolages : Gaétan complètera seul. Nous nous sommes bien amusés pour ces quelques jours de vacances inattendus.
En après-midi, alors que le ciel s’obscurcit, nous chargeons ma monture sur le porte vélo et les bagages dans la voiture. En route, c’est le déluge et nous croisons une rare cyclotouriste, souriante sous la forte pluie. En arrivant à Sherbrooke, le ciel se dégage.
Claire, conjointe de Gaétan, y habite le plus souvent puisqu’elle y travaille. Nous profitons d’un bon repas en agréable compagnie et d’une soirée calme.
Aujourd’hui, c’est encore gris, mais un dégagement s’annonce. Petit drame : le chat de la maison a l’habitude de ramener des souris ou des musaraignes donc il n’a que faire, étant bien nourri, mais aujourd’hui c’est un jeune lièvre encore tout chaud qui est déposé sur le balcon. Le maître ne félicite pas son animal favori. Le minou aura bientôt un joli grelot au cou pour protéger la faune locale.
En attendant, deux bricolages sont au programme. Nous démontons le projecteur à diapositives et constatons, comme prévu, qu’un engrenage a perdu plusieurs dents. Comme les pièces restent disponibles, ce sera facile à réparer ; en attendant, nous déconnectons un fil. Il y a aussi un climatiseur sur roulettes dont le compresseur démarre dès que la fiche est connectée dans le mur et qui s’arrête rapidement pour ne pas surchauffer. À nouveau, démontage de l’appareil, diagnostic et réparation facile : un relais inutilisé remplace celui qui est défectueux. Succès.
Il est temps de partir en balade. Nous prenons la route vers Sainte-Marie-de-Beauce pour rencontrer notre sœur Lucie et son fils Émile. En cours de route, le soleil émerge des nuages et c’est sous un ciel magnifique que nous passons de belles heures ensemble entre tour du propriétaire, piscine, repas et diapositives, évidemment.
Il est près de minuit quand nous revenons à Frontenac.
C’est une journée pluvieuse, alors nous poursuivons les bricolages. Tant que je limite certains mouvements, je reste assez fonctionnel. Le ménage du garage se poursuit.
Comme nous avons une bonne quantité de cartons et d’emballages, nous préparons un voyage à l’éco-centre, de l’autre côté de Mégantic. Sur place, nous constatons qu’il est fermé pour la semaine, nous ramenons le tout.
Nous passons à la quincaillerie et nous procurons des bandes antidérapantes pour l’escalier, que nous posons tranquillement. Succès.
En soirée, Gaétan sort un projecteur à diapositives et quelques carrousels. Nous replongeons dans l’enfance avec ces images rescapées du passé. Le projecteur n’avait pas servi depuis longtemps, il émet soudain un bruit douteux. Bricolage à venir
Nuit correcte, lever précautionneux : je dois m’y faire pour un temps.
Il fait beau, mais la pluie s’annonce pour plus tard. Le garage de mon frère étant assez envahi, nous nous lançons dans un bon ménage, déplaçant et remplissant des étagères. Il y a aussi des armoires neuves : les trois reposant au sol sont déjà montées et assez remplies, mais un module mural attends d’être installé. Afin de bien faire les choses, il faut déplacer un radiateur électrique, une opération assez simple mais pendant laquelle nous perçons le tuyau de sortie d’air de la sécheuse, qu’il faut évidemment réparer.
Tous ces bricolages prennent une bonne partie de la journée et sont coupés par une bonne baignade dans le lac agité de forts vents.
Tous ces bricolages prennent une bonne partie de la journée et sont coupés par une bonne baignade dans le lac agité de forts vents.
En fin de journée, la pluie prévue arrive. Après le souper, nous vérifions et ajustons les vitesses de mon vélo, un travail délicat mais bien réussi : j’ai désormais accès à tous mes pignons, sauf un, et tout passe très souplement.
Il reste un peu de temps. Nous regardons un historique concert de Pink Floyd donné à Venise en 1989. Si le spectacle lui-même était excellent, il a été une catastrophe logistique pour la ville. Pour nous, la soirée se termine bien.
En camping sauvage, je dors très bien mais je pars tôt. Debout peu après 5 h 30, je suis sur la route à 6 h 20. La tente est bien rangée mais trempée par la rosée de la nuit.
La route 108 est facile jusqu’au village de Cookshire, puis je prends la route 212, toujours franc est. Je déjeune assis sur de gros rondins à la sortie du village, puis je poursuis un trajet tout en montées (plus) et descentes (moins). Si je gagne en altitude, mes réserves d’eau s’amenuisent rapidement. C’est au petit restaurant de Island Brook, minuscule regroupement de maisons le long de la route, que je peux remplir enfin mes bouteilles de leur excellente eau.
Le Mont Mégantic s’élève, de plus en plus proche. Une descente abrupte me mène à La Patrie pour acheter des fruits et remplir à nouveau une gourde – par cette chaleur, je consomme quelques litres aux 100 km. Après la jolie vallée, je m’attaque aux grosses et longues côtes, souvent bien droites, typiques du secteur des montagnes frontalières. En contournant le Mont Mégantic par le sud, la route monte par paliers à près de 600 m. C’est bien loin des cols suisses, qui dépassent parfois les 2400 m, mais ça grimpe solide.
Je dîne à Notre-Dame-des-Bois, plus haut village du Québec, avec une vue splendide sur la région dominée par le Mont Mégantic. À la halte routière, il y a un… édicule de métro, projet artistique permettant de «connecter le village à un réseau imaginaire de transport collectif». Créatif et amusant.
Il reste encore quelques solides côtes avant de rejoindre Woburn, tout près de la frontière américaine infranchissable en ce temps de pandémie. De toute façon, je vais vers le nord, car mon frère Gaétan habite tout près du lac Mégantic. Je suis chez lui vers 14 h 45. Nous nous retrouvons avec joie ; si nous nous parlons régulièrement, nous ne nous étions pas vus depuis Noël.
Tout d’abord, je monte ma tente afin qu’elle sèche. Nous apportons le vélo au garage, nous le déchargeons et apportons les sacs à ma chambre, au sous-sol. En arrivant en haut de l’escalier, mes deux pieds glissent et je descends les marches assis. Ayoye ! S’il ne semble pas y avoir de dégâts majeurs, j’ai le coccyx assez douloureux. Je peux marcher, plus lentement, c’est douloureux dans les escaliers, et ça annonce un changement de programme…
Après coup, nous analysons l’incident : il y a de la sciure dans le garage et les marches vernies sont très glissantes, mon frère avait déjà failli tomber à plusieurs reprises. Ce sera à corriger.
Après une bonne douche, le ramassage de la tente et une brassée de lavage, nous mangeons en excellente compagnie. La soirée, tranquille et ponctuée de musique avec guitare et piano, se termine sous les étoiles dans le spa où je descends avec précautions. Je dois aussi me coucher prudemment…
Nuit calme mais très humide, la tente est trempée ce matin. Le ciel, lui, est d’un bleu sans partage. Levé peu avant 8 h, je suis sur la route dès 9 h 30.
Je quitte le Parc par la piste cyclable de la digue, puis je choisis de rouler sur la route plutôt que de prendre la piste cyclable en poussière de roche. La circulation reste réduite et ça roule plus facilement.
Il fait très beau et la chaleur s’intensifie rapidement. De plus, les routes de la région sont souvent de longues lignes droites tracées sans tenir compte du relief. Il y a donc de nombreuses montées et descentes. Souvent, je passe à l’intérieur d’une même minute de plus de 50 km/h à moins de 5 km/h. De plus, mon dérailleur arrière choisit ce matin pour refuser d’accéder aux plus petits pignons, utiles pour maintenir mon élan en au pied des côtes. À suivre.
Je contourne par le nord le Parc du Mont-Orford, profitant de la plage du Lac Fraser pour la pause du dîner. Hier, j’avais contacté mes amis Michel et Agnès, de Granby, mais ce n’est que ce midi que je reçois leur réponse : nous nous sommes manqués…
J’entre à Sherbrooke par la route 220. J’ai heureusement mon téléphone, car l’itinéraire, nouveau, n’est pas vraiment évident. Il est près de 15 h quand j’arrive chez mes amis Gérard et Georgette, qui m’attendent pour un bout d’après-midi et un bon souper. Leur fille Jasmine, amie après avoir été élève il y a quelques décennies, nous rejoint après son travail. Agréables retrouvailles.
Vers 18 h 30, je reprends la route pour encore quelques kilomètres. Après Lennoxville, je reviens en campagne et je commence à inspecter les abords de la route afin de dénicher un site possible de camping. Vers 20 h, je m’installe dans une plantation d’arbres de Noël, confortable et discrète. Comme j’ai déjà mangé, je suis rapidement prêt à dormir alors que la noirceur enveloppe rapidement les lieux. Si j’entends un peu les voitures, c’est un camping parfait dans les circonstances. La nuit, dégagée, s’annonce excellente.
Départ normal : pas mal de préparatifs, et enfin prendre la route. Le vélo et le cycliste sont en pleine forme, le ciel, lui… est un peu douteux, gris avec des risques d’averses. Pas de problème.
Je longe d’abord le Saint-Laurent à partir de Dorval, ayant décidé de prendre le Pont Champlain. Tout neuf, celui-ci comporte maintenant une excellente piste cyclable, large et confortable, offrant une vue unique et spectaculaire sur la ville.
En revanche, c’est ensuite un peu complexe de rejoindre mon itinéraire. Je suis bien heureux quand je quitte les zones urbanisées pour enfin rouler en campagne, essentiellement sur des routes nouvelles pour moi.
Chambly est toujours une jolie étape, avec son fort, son canal, la rivière Richelieu et le canal. J’emprunte la route 112 pour quelques kilomètres, puis je constate que la piste cyclable parallèle est pavée et j’en profite. C’est plus confortable que la proximité de la circulation.
En fin de journée, alors que les nuages ont totalement disparu, je traverse Granby et le Lac Boivin, et une autre piste cyclable en forêt me mène au Parc de la Yamaska, où je prévois dormir. Comme la plupart des parcs provinciaux, celui-ci adhère au programme Bienvenue Cyclistes, me garantissant une place… mais pas un site. Comme tout est plein, la préposée me dirige vers un vaste stationnement gazonné. L’espace est immense, j’ai une table, beaucoup de gens passent sur le sentier à proximité, mais les services sont un peu loin.
Alors que je m’installe, Maxime, qui vient de compléter sa première journée de cyclotourisme à vie et en est ravi, arrête pour discuter un peu. Il a de nombreuses questions, j’ai quelques réponses, et surtout la rencontre est bien agréable.
Après souper et douche, la nuit est tombée et je m’installe dans ma tente. Un bruit suspect m’en fait ressortir rapidement : un raton laveur essaie de déchirer le sac de nourriture attaché à mon vélo, comme je fais chaque soir sans problème. Les dommages sont limités, mais je le suspends hors de sa portée. De toute évidence, la proximité des humains lui a enseigné de bons trucs. Après ce faux départ vers le sommeil, je m’endors facilement sous ma confortable tente.