Le Liteau

2021-12-29 – 12,5 km > Le Liteau
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Nous nous levons de très bonne humeur. Le feu, bien bichonné, a tenu toute la nuit. Et des trous bleus apparaissent au travers des nuages, annonçant le dégagement imminent. Skier sous le soleil sera un vrai plaisir. Les conditions restent excellentes même s’il n’a pas neigé cette nuit. Nous prenons la piste un peu après 10 h.

Au début, celle-ci monte tranquillement, alors qu’au-dessus de nos têtes les arbres givrés se découpent en blanc sur fond bleu. Magnifique ! À partir de l’intersection de la piste de l’Ours, je prends la tête alors que la descente s’amorce. La neige est parfaite, il fait soleil, tout va bien.

Arrive une courbe, même pas difficile, je perds le contrôle et je chute. Aouch ! Mon épaule gauche a pris un mauvais coup et je n’ai aucune force dans mon bras. Je me relève avec l’autre bras, ma tête tourne, je laisse tomber mon sac et je m’assieds. 10 h 45, fin de parcours pour moi : j’ai une épaule démise. Et ça fait très mal.

Mes amis arrivent. René a été patrouilleur de ski pendant des années. Il pose rapidement le diagnostic, constate que je suis incapable de me déplacer, ou même de me tenir debout. Rapidement, tout s’organise. Philippe part à skis vers le poste d’accueil alors que Céline et Alexandre reviennent sur nos pas pour retrouver du signal cellulaire, absent ici. René et Franck prennent en charge les soins.

À ma demande, ils tentent de remettre mon épaule en place immédiatement, avant que l’enflure soit trop grande, mais ça ne fonctionne pas. Ils assurent donc mon « confort » en attendant les secours, m’isolant de la neige et me couvrant de vêtements, d’une couverture de survie et d’un sac de couchage. Mon bras blessé est si douloureux que je peine parfois à rester conscient… et l’attente se prolonge.

Heureusement, il ne fait pas très froid, il fait soleil et il y a très peu de skieurs. Nous profitons de ce temps d’attente pour transférer du matériel vers leurs sacs : chaudron, réchaud, bouffe, filtre, sans oublier, quand même, la clef de ma voiture. Je bois quelques gorgées d’eau, mais je ne mange pas afin de pouvoir être anesthésié au besoin.

En attendant, quand même inquiets, mes autres amis reviennent tranquillement, mangent, se préparent le mieux possible.

L’équipe de secours arrive vers 13 h 15 : sur une motoneige du parc, un garde et un ambulancier ; sur un quatre roues, un pompier. Tout s’organise rapidement. Ému, je remercie et salue mes amis, et c’est le pompier qui me prend à son bord, bien emmitouflé, pour une descente prudente. Direction l’hôpital, enfin.

Après consultation avec le garde du parc et entre eux, mes amis décident de poursuivre l’aventure, une excellente idée. La piste descend bien pour plusieurs kilomètres, jusqu’à l’intersection pour les Chutes Croches – tiens, c’est ironique… – vers lesquelles ils font un petit détour sans sacs et sans regrets : c’est de toute beauté.

Les cinq kilomètres entre les Chutes Croches et Le Liteau sont les plus difficiles de toute notre expédition. Avec la nuit qui s’installe, les kilomètres s’égrènent et on se réjouit d’atteindre le refuge avant qu’il ne fasse complètement nuit. Les événements de la journée avaient utilisé toute notre marge de manœuvre. Un autre incident aurait pu nous placer dans une fâcheuse position.

Le Liteau est un joli petit refuge près d’un lac bien gelé. Il l’atteignent vers 16 h 30, alors qu’il fait presque nuit. Heureusement que le sentier est tracé ! Tous sont heureux de déposer les sacs. C’est plutôt frais à l’intérieur puisque la braise est presque éteinte.

Tout s’organise rondement, l’équipe est maintenant bien rodée. Je n’y suis plus, mais j’y suis quand même un peu, selon mes amis. « Je tiens à te rassurer : ton esprit nous a suivi tout au long de l’expédition. Je ne compte plus les phrases qui ont débuté par « Si Réal était là, il nous dirait… » Un énorme merci pour l’organisation. Tu as formé une équipe du tonnerre qui était à la hauteur de tous les défis, incluant celui d’évacuer son chef d’expédition en toute sécurité et de poursuivre l’excursion malgré tout ! »

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