Pluie sur la « Rain Forest »

> Gatton Creek Campground (Quinault) – 80 km
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Mercredi. Au milieu de la nuit, crépitement de pluie sur la toile… jusqu’à mon lever. Bien sûr, ma tente est trempée au matin, mais l’intérieur est bien sec. Avant de sortir, tout mon matériel est rangé en mode « pluie » et je n’ai plus à retourner à l’intérieur ensuite.

À 9 h, je quitte le camping vers le sud, puisque c’est par là qu’il y a une épicerie digne de ce nom. C’est donc vers 10 h que je prends vraiment la route.

Après un petit bout le long des plages – que je ne vois pas –, je rentre à l’intérieur des terres. Scénario route connu : des conifères, des coupes de bois, des villages rares et ravagés. Jusqu’à la 101, il n’y a pratiquement aucune circulation ; ensuite, elle est restreinte mais rapide, donc à surveiller. Faute de mieux, je mange debout, sur l’accotement. Il y a de jolies collines à l’est, laissant espérer de jolis paysages, et ça monte tranquillement. Je ne croise qu’un seul cyclotouriste.

J’entre enfin dans la Olympic National Forest. En arrivant près de Quinault, changement radical d’ambiance : je suis dans la « Rain Forest », peuplée de sapin géants, de fougères et de mousses. Magnifique !

J’avais de toute façon décidé de coucher à Quinault, puisque les campings y sont plus accessibles. Il y a une raison de plus : c’est très beau. Je bifurque donc vers le village. Une longue descente – à remonter demain, probablement – et je vois deux cyclotouristes connus : Maxime et Erin. Ils se sont retrouvés et ont suivi un itinéraire assez semblable au mien, sauf qu’ils ont roulé à la pluie ce matin. Ils continuent leur périple, mais nous échangeons nos coordonnées et des photos.

Au village, on m’indique que les campings sont payables sur place, en choisissant un site libre. Le Gatton Creek Campground est moins cher – c’est quand même 20 $ sans eau ni rien – et les sites ne sont accessibles qu’à pied, mais c’est franchement superbe. Il y a que cinq sites, et du mien je suis presque sur la plage de galets, avec une vue fantastique sur les montagnes en face. Pour un peu, on se croirait dans les Alpes.

Puisque le soleil est de retour, je fais bien sécher la tente près du lac, puis j’installe le campement avant de partir marcher. Je dois pédaler un peu – sans bagages, c’est étrange – puis stationner mon vélo avant de mettre mes sandales.

Je parcours une boucle d’environ 2,5 km, très agréable au milieu des arbres géants et des cascades, malgré quelques averses. Je rentre au camping, très heureux de mes choix, mais je me réfugie dans la tente puisque la pluie est de retour. Pas grave : j’écris le journal en musique.

Il est 20 h et la pluie continue : je me mets au souper dans le vestibule de ma tente, assez vaste pour servir de – minuscule – cuisine à l’abri des intempéries. Il pleut toujours quand je me couche, vers 22 h, mais j’ai des voisins arrivés in extremis : une famille d’australiens vivant en Suède. Le monde voyage…

km jour : 79,4
km total : 1722
départ / arrivée : 9 h 00 / 15 h 45
temps de trajet : 4 : 43
vitesse moyenne : 16,8
vitesse maximale : 51,7
camping : 20 $

La route est courte

> Ocean City State Park (Ocean City) – 65 km
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Mardi. Cette nuit, j’ai eu un peu froid. Au lever, comme il fait encore beau, je fais un peu de lavage avant de revenir à ma tente et au journal. Il est plus de 9 h 30 quand je sors enfin dehors. Je suis donc en route vers 10 h 45, pas mal plus tard que d’habitude.

Comme hier, le ciel est plutôt nuageux puis se dégage en début d’après-midi. C’est donc parfait pour rouler, ce que je fais bien évidemment.

De la route, il y a peu à dire. Jusqu’à Aberdeen, seule ville d’importance aujourd’hui, de longues lignes droites, peu de relief et peu de vues. En ville, une traversée de pont délicate, comme souvent, de la circulation… et je ne trouve pas d’épicerie digne de ce nom. Je prends un strict minimum dans un dépanneur.

La suite du trajet est semblable à ce matin, avec du soleil en plus et un 3 km de bonnes côtes pour casser la monotonie. Je croise deux cyclistes seulement – Britt et Andrew, de l’Arkansas – avec qui nous échangeons quelques informations.

Un peu plus loin, j’ai à choisir mon chemin : vers l’intérieur ou vers la côte ? Je choisis la côte pour plusieurs raisons : c’est plus sur, plus facile après la journée d’hier, j’ai plus de chances de trouver électricité et nourriture, et j’apprécierais une journée de « congé ». Je suis donc dès 16 h à Ocean City SP, près de la ville du même nom.

Une fois le campement monté, je vais voir la mer. C’est toujours beau, mais moins qu’hier : la plage est très plane, la mer loin et il y a des voitures qui circulent. Alors que j’ai les pieds à l’eau – il fallait quand même y toucher, à cet océan ! –, mon téléphone sonne. J’avais laissé des messages à mes frères, et c’est Gaétan qui rappelle. J’ai ainsi quelques nouvelles de la famille. Tous vont bien, ils ont amené ma mère au chalet, et le bateau est abîmé après son naufrage mais semble fonctionner encore.

Je rentre souper à ma tente, puis je vais à la salle de bains pour écrire et recharger l’ordi. J’en profite pour appeler ma sœur Monique avant de me diriger à nouveau vers la plage pour le coucher du soleil. Ce n’est pas très impressionnant : les nuages ont envahi le ciel…

km jour : 66,4
km total : 1642
départ / arrivée : 10 h 45 / 16 h 00
temps de trajet : 3 : 48
vitesse moyenne : 17,7
vitesse maximale : 47,0
camping : 12 $

C’est encore loin ?

> Twin Harbors State Park (Westport) – 135 km
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Lundi. Ce matin, le soleil est fort sur les tentes, alors tout est bien sec. Anne est déjà partie, alors je déjeune avec Max et Erin.

Parti peu après 9 h 30, j’arrête au village de Ilwaco pour des achats minimaux – la prochaine épicerie peut être loin – et j’y retrouve Max. Nous roulons de concert jusqu’à l’entrée de Long Beach. Il y a un kiosque d’information touristique qui nous fournit quelques infos et une carte routière bien utile.

Comme Erin reste introuvable, Max part vers Long Beach afin de la chercher. Il ne semble pas pressé. Je soupçonne une grosse journée, alors je file sur la 101.

Le premier bout, plat avec vent de dos, est facile et rapide. Une montée, des coupes de bois assez sauvages, une descente et je me promène sans trafic dans de belles forêts très relaxantes, puis le long d’une baie qui est aussi réserve faunique.

Je traverse la grosse rivière Naselle, puis je la longe jusqu’à l’intersection de la route 4. Il y a un peu plus de trafic, mais rien de problématique. En plus l’accotement est assez confortable. Je salue deux cyclistes allant vers le sud. Bénédicte et Mathilde, deux sœurs, sont québécoises et très enjouées. Nous passons de bons moments à discuter.

Ensuite, forêts, forêts, baies, coupes de bois, forêts. Un nom de village ? Cinq maisons dispersées, quelques chemins de part et d’autre… Bref, c’est beau, mais assez reculé.

Vers la mi-journée, le soleil hésitant de l’avant-midi prend toute la place. Après 75 kilomètres, je traverse Raymond, la seule ville de la journée. Je fais mes courses. Je repars et rejoins Bill, un cycliste de la place. Nous roulons ensemble sur la piste cyclable jusqu’à la sortie de la ville. Retraité en forme, il roule et marche avec enthousiasme.

Je repars le long de la baie de Willapa. C’est très plat, avec de longues lignes droites et un vent de face parfois gênant. C’est souvent beau, mais sans le côté spectaculaire des dernières semaines. Fatigué, je progresse lentement vers le camping.

À 125 km précisément, j’arrive enfin à Grayland Beach SP. Problème : il n’y a plus de place, même pour les randonneurs. Solution : le prochain camping, 7 km plus loin. Devant mon air déconfit, le préposé fait toutes les démarches pour s’assurer que tout ira bien. Il me donne même une série de jetons pour les douches.

Je monte la tente et soupe en vitesse, puis je marche jusqu’à la plage : c’est peut-être mon dernier soir près du Pacifique, et il fait beau. Le soleil est déjà couché, mais je reste longtemps au bord de l’eau à regarder et écouter les vagues briser sur le sable.

Je reprends la route, les jambes un peu molles, et il est 20 h quand j’arrive pour de bon, à Twin Harbors SP. Tout est parfait : l’accueil, le site avec du bois pour le feu – que je n’utiliserai pas –, les services… Il n’y a pas d’autre randonneur et le camping est loin d’être plein. Je ne socialiserai pas ce soir.

Ensuite, évidemment, douche et dodo. Demain, j’espère que ce sera plus facile, quand même.

km jour : 133,9
km total : 1576
départ / arrivée : 9 h 45 / 20 h 00
temps de trajet : 7 : 35
vitesse moyenne : 17,6
vitesse maximale : 52,9
camping : 12 $

La traversée vers Washington

> Cape Disappointment State Park (Long Beach) – 105 km
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Dimanche. Pendant la nuit, la bruine a cessé et la tente a séché. Moi, j’ai dormi. Je me lève tôt, vers 7 h, discute un peu avec Mathieu à propos de l’itinéraire et je suis sur la route à 9 h.

Le ciel est gris, le soleil tente de timides percées mais reste discret aujourd’hui. En revanche, ce n’est pas froid.

En partant, je traverse Manzanita, village touristique de plage. Dès que je quitte la mer, ça monte très sérieusement, et ça se poursuit sur la 101, heureusement assez calme ici. Beaux points de vue à partir de Oswald West SP, bonne descente, puis la route entre dans les terres pour contourner Arch Cape. C’est du sérieux, mais c’est beau, avec un vrai paysage de montagne. En arrivant en haut, je vérifie ma moyenne – 13,4 km/h – et après la descente et le tunnel, elle est rendue à 15,2 km/h.

Jusqu’à Cannon Beach, ça monte et descend un peu, puis je traverse le village. De retour sur la 101, par une entrée style autoroute, je me retrouve dans le gros trafic jusqu’à Seaside. Assez infernal.

Contraste : Seaside se traverse par une piste cyclable qui longe la mer. À part l’agglutinement de touristes près de la plage, c’est très calme. Je dîne sur un banc avec vue sur l’océan.

Je ne retourne pas sur la 101. Une calme route en montagne, puis dans une vallée agricole, me mène directement à Astoria. Je traverse la ville par une petite rue qui vire le long de la colline, regardant le long pont de la 101 auquel j’ai échappé.

Bientôt, je découvre celui auquel je n’échapperai pas. Ayoye ! Il est haut, long, étroit, venteux, encombré de voitures… mais spectaculaire au dessus de l’estuaire de la rivière Columbia. J’enfile ma veste jaune fluo et je me lance.

D’abord, une longue montée en courbe permet de rejoindre une superstructure au-dessus de la voie navigable. Il y a des travaux et la circulation alternée. Je pars avec les voitures. La descente est infernale avec le vent qui me fait vaciller et les voitures qui me suivent ou me frôlent. Plus loin, j’arrête quand les voitures arrivent et repars quand c’est plus tranquille. Au total, la traversée fait 6,5 km ! Pas trop souvent, SVP. En tout cas, je suis dans l’état de Washington et encore vivant.

Ensuite, je reprends la 101, qui longe la mer un bon bout de temps. Malgré le vent de face, ça va assez bien, car le trafic est assez léger. Dans un village, il y a une petite épicerie sans fruits : j’y achète le minimum requis. Ensuite, il suffit de pédaler tranquillement jusqu’au Cape Disappointment SP.

Le camping est plein, comme souvent, mais il y a toujours de la place sur les sites Hike & Bike. Deux tentes sont déjà montées et deux vélos sont sagement rangés non loin. De la première émerge Max (Maxime), de Québec. Il est sur la route depuis 11 mois, ayant vu à vélo les Grands Lacs, le Mississipi, la Floride, Haïti, puis la côte ouest. Tout un périple. La deuxième héberge Erin, une californienne avec qui il voyage depuis quelques semaines. Un dernier vélo arrive avec Anne, une étudiante ontarienne. Vive les rencontres cyclistes !

Après la douche, je m’installe dans une salle de toilette individuelle – le luxe – avec mon ordi afin d’écrire, de recharger la batterie, qui en a bien besoin, et de faire un bon ménage des photos. Je fais le tout en musique, quand même. Ça prend du temps, je me couche à près de 1 h, mais j’attendais l’occasion depuis longtemps. La nuit sera bonne.

km jour : 107,5
km total : 1442
départ / arrivée : 9 h 00 / 18 h 15
temps de trajet : 6 : 55
vitesse moyenne : 15,5
vitesse maximale : 50,6
camping : 12 $

Contourner les baies

> Nehalem Bay State Park (Manzanita) – 80 km
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Samedi. Ce matin, il y a du brouillard. Ça ne m’a pas empêché de très bien dormir. Déjà, l’Oregon achève…

Je prends plus d’une heure pour le journal et quelques détails informatiques, puis je me prépare tranquillement alors que le soleil brille maintenant de tous ses feux. La journée s’annonce à nouveau splendide.

Comme d’habitude, je suis en route vers 10 h 15. Jusqu’à Netarts, la route longe la baie du même nom et c’est très facile. Ensuite, ça devient très accidenté, de fortes montées et descentes se succédant, avec des vues en conséquence.

Après Oceanside, ça monte jusqu’à l’entrée du Cape Meares SP. Ensuite, la route est barrée, avec une barrière et un cadenas. Il y a une petite place pour contourner à pied avec mon vélo. J’y vais, évidemment. De fait, certaines sections sont impraticables pour les voitures – elles sont plus ou moins effondrées – mais en vélo ça va très bien en étant prudent, car ce n’est qu’une longue descente. En prime, il n’y a pas de problème avec la circulation.

Plus bas, la route est à nouveau ouverte, mais il n’y a personne. Juste avant l’intersection du bord de l’eau, un troupeau d’élans – à l’œil, une vingtaine – broute allègrement à côté de la route. Nous nous voyons en même temps, ils disparaissent à toute vitesse dans le bois…

La route suit le bord de l’eau, bien horizontale, et je file allègrement. Je prends une petite pause quand je rencontre Everett et Carmen, des cyclotouristes albertains en tandem et parlant français. Un peu plus loin, je croise deux néo-zélandais. Dans chaque cas, je les informe de la situation devant eux.

À Tillamook, j’arrête à l’épicerie. Mon vélo est dans une zone Wi-Fi, alors j’en profite pour lire une partie de mes nombreux courriels. Le premier est d’une voisine du chalet qui nous avertit que le bateau est au fond de l’eau. Il fallait s’y attendre, mais je relaie l’information à mes frères et j’en appelle un, qui était au courant. À suivre…

Après cette bonne pause, je poursuis sur la 101. Il y a plein de voitures et de commerces, alors je passe le plus vite possible. J’arrête à Bay City pour manger un peu. Dans le petit parc, des familles arrivent pour l’anniversaire d’une fillette d’environ 9 ans. C’est bien joyeux.

À Garibaldi, joli village de pêcheurs, il y a de vieux trains, dont une locomotive à vapeur qui se promène. Plus loin, c’est Rockaway Beach, un long piège à touristes qui semble bien fonctionner. À l’intérieur des terres, les montagnes sont plus hautes maintenant, mais le brouillard de la mer envahit tranquillement le paysage.

Je contourne une autre baie alors que le brouillard devient petit crachin, même si le ciel est bleu vers l’est. J’arrive au camping avant 18 h, très content de terminer tôt avec cette météo. Il y a plusieurs cyclotouristes, dont Mathieu, un gars de l’Outaouais qui en est à son premier voyage à vélo. Il devait partir de Seattle, mais un retard d’avion lui a fait manquer une correspondance. Il a donc commencé à Vancouver, en suivant la 101 le long de la mer… qu’il n’a pas vue souvent. Le crachin plus intense nous retourne chacun de notre côté.

J’ai le temps de terminer le journal d’aujourd’hui avant qu’il ne fasse trop noir. Alors que je sors pour aller prendre ma douche, une jeune femme arrive. Il était temps pour elle ! J’utilise pour la première fois mon mini parapluie de voyage, et j’apprécie une fois de plus une tente grande et étanche. Avant de dormir, je regarde ce que j’ai comme cartes et… je poserai des questions demain car rien n’est clair sur le chemin à prendre après Astoria. Évidemment, ça ne trouble pas du tout mon sommeil.

km jour : 79,9
km total : 1334
départ / arrivée : 10 h 15 / 18 h 00
temps de trajet : 4 : 49
vitesse moyenne : 16,0
vitesse maximale : 46,9
camping : 6 $

J’aime les petites routes

> Cape Lookout State Park (Netarts) – 105 km
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Vendredi. Un autre très beau matin. Chacun se prépare à son rythme. On m’avait parlé d’une possibilité de connexion Internet : c’est vrai, mais la dame m’indique que ce n’est que pour 15 minutes. Je m’installe pour écrire sans me connecter, mais j’avais mal compris : c’était 15 minutes au total. Un peu impatiente, elle me laisse terminer un envoi express mais un peu en désordre… Il est 10 h 15 quand je prends la route.

Il y a beaucoup de circulation, mais je prends rapidement une petite route. La montée et la descente par Otter Rock sont un enchantement : pas de trafic, et de très belles vues. Je redescends en même temps qu’un homme à pieds, et à peu près à la même vitesse puisque j’arrête beaucoup. Je crois un couple de cyclistes allemands, Friedrich et Silke. Aujourd’hui, il y a très peu de cyclistes.

De Depoe Bay à Otis, la 101 est à son pire. C’est pratiquement impossible de traverser tellement il y a de véhicules. La traversée de Lincoln City est un sommet en la matière… Je suis très heureux de bifurquer vers la Old Scenic 101.

C’est l’autre extrême. En 15 kilomètres, je croise trois voitures et une moto. La route monte tranquillement le long d’un ruisseau – je l’entends chanter avec les oiseaux – au milieu d’une belle forêt. Ensuite, quelques bons lacets et la descente : c’est parfait, je chante même à voix haute.

La 101 est maintenant beaucoup plus calme, mais je la quitte à nouveau pour aller vers Pacific City, petite ville touristique au bord des dunes. Je fais l’épicerie, puis la route qui monte doucement le long d’un estuaire est à nouveau déserte.

Après un virage à gauche, les choses sérieuses commencent. Cape Lookout est le point le plus élevé de la route en Oregon, alors ça monte sérieusement. J’ai déjà près de 100 kilomètres dans les jambes aujourd’hui, mais ça va. Un petit point de vue, une grande descente assez spectaculaire et je suis au camping.

Le site est absolument splendide, en bord de mer sous les grands arbres qui ne cachent pas le soleil couchant. Il y a du monde, mais je ne rencontre personne aujourd’hui. Je procède rapidement aux routines, car il est déjà tard. Il n’y a pas d’étoiles, et je m’endors bercé par le bruit incessant des vagues sur la plage.

km jour : 104,1
km total : 1254
départ / arrivée : 10 h 15 / 19 h 40
temps de trajet : 7 : 02
vitesse moyenne : 14,8
vitesse maximale : 47,9
camping : 6 $

Quelques belles vues

> Beverly Beach State Park (Newport) – 100 km
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Jeudi. Un matin de lumière, ciel bleu magnifique. Belle journée en perspective. Nous nous retrouvons entre québécois – je donne un coup de main mécanique à Marie – avant leur départ. Je rencontre des voisins américains, Annabelle et Chili, puis chacun prend la route.

Une bonne descente puis la traversée de Florence – une longue suite de commerces sur terrain plat – et un bout derrière les dunes avec vent de face, ça donne une couleur. Mais ensuite, ça commence à monter, dévoilant les magnifiques dunes.

La route étroite et tortueuse est très belle malgré un bon trafic et l’absence d’accotement. Les ouvertures vers la mer sont spectaculaires, il y a même un petit tunnel.

Je croise un trio de cyclistes : Marco, un américain, ainsi que Michel et Audrey, de Sherbrooke. Ceux-ci me prêtent leur carte de l’état de Washington, que je leur enverrai par la poste au retour. Un bon arrangement.

Après cette section, la route devient plus facile mais reste très belle jusqu’à Yachats. Ensuite ? Plus rien. De longues lignes droites derrière les dunes, des plages à perte de vue – mais que je ne vois que rarement – et, parfois, un petit cap pour montrer le potentiel de beauté. Quand même, la mer et ses grosses vagues sont assez spectaculaires. À chaque ville, un long pont, souvent étroit, des commerces, et ça recommence.

Jolie exception : Newport, centre régional. Le pont de deux kilomètres est particulièrement pénible – un conducteur me crie : « Walk your bike ! » sans avoir la moindre idée de ce dont il parle. C’est une malheureuse exception, presque tous sont vraiment courtois. Il y a aussi un beau parc après le pont, et une mer spectaculaire.

Peu après, j’arrive enfin au camping. Il y a plusieurs cyclistes, dont deux québécoises – Marie-Josée, qui vit à Singapour, et Andrée, directrice d’école de La Prairie – et des anglophones d’un peu partout, dont un australien. Je me prépare rapidement, puisqu’il est tard, alors que certains se passent une pipe au contenu indéterminé.

Ensuite, douche et dodo.

km jour : 101,2
km total : 1150
départ / arrivée : 10 h 00 / 20 h 00
temps de trajet : 7 : 00
vitesse moyenne : 14,4
vitesse maximale : 45,5
camping : 6 $

Des arbres et des arbres

> Honeyman State Park (Florence) – 115 km
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Mercredi. Au lever, la tente est légèrement humide, mais sèche rapidement. Après avoir complété le journal, je rejoins Susan et Matt. Nous déjeunons ensemble – les céréales avec le lait, c’est quand même bon – et échangeons pendant une bonne heure. Très belle rencontre : nous espérons nous revoir, et je suis invité chez eux. Ça me tente, mais c’est un détour considérable.

De retour au campement, je ramasse rapidement mon matériel car j’ai l’intention de faire une bonne journée. Je croise une dame de 77 ans qui marche tranquillement le sentier côtier. Wow !

Ce sera gris et frais toute la journée, malgré de petites tentatives d’éclaircies. J’apprécie grandement le confort de mon nouveau coupe-vent : il est très bien adapté aux conditions et je le mets régulièrement. Quand il ne sert pas, il disparaît facilement car il est léger et minuscule. De plus il est très très voyant en jaune fluo, un avantage certain.

Après un petit bout sur la 101, le trajet suggéré – vive la carte ! – prend Seven Devils road. C’est super calme, à part les cyclistes que je croise nombreux, descendant la grosse côte que je monte. Il n’y en aura pas d’autres aujourd’hui.

C’est joli, en pleine forêt, tortueux. En haut de la côte, je traverse une zone de coupe de bois. C’est peut-être utile, mais ce n’est plus joli du tout. Une solide descente me mène à Charleston, joli port de pêche. On m’a dit que le camping est très bien, mais il est bien trop tôt.

Je suis ensuite à North Bend, où je fais les achats du jour, puis je retrouve la 101. Elle se surpasse : je dois traverser un long pont étroit où le trafic est bien dense. Au moins, je peux déclencher un signal signalant ma présence et diminuant la limite de vitesse.

Après une longue digue, la route retourne en forêt. Toujours, les véhicules y sont gros et nombreux, alors je quitte pour l’ancienne route quand je le peux.

À Whinchester Bay et Reedsport, même scénario : un camping que je laisse passer, trafic, pont étroit, cette fois-ci avec des travaux, et une seule voie. En revanche, les voitures se raréfient sérieusement pour le reste du trajet.

Au village suivant, un homme m’interpelle de son camion de travail : il m’offre de m’emmener plus loin, car il y a une grosse côte et encore un bon bout à faire. Je décline en le remerciant : c’est très gentil de sa part.

C’est bien vrai, ça monte longtemps mais ce n’est pas très à pic alors c’est assez facile. En haut, le paysage est à deux vitesses : d’un côté, forêt et lacs ; de l’autre, coupes à blanc. La descente mène à un parc fédéral qui préserve les fragiles dunes côtières et leur environnement. Je les entrevois à peine, mais plusieurs stationnements permettent d’y accéder. Il y a aussi quelques campings fédéraux, j’en ignore l’organisation et les services, alors je poursuis mon chemin.

J’ai maintenant plus de 100 km dans les jambes aujourd’hui… et ça va toujours bien. Maintenant, les végétaux ne sont plus très exotiques : on se croirait dans les Laurentides. Je passe Dunes City et j’arrive enfin au Honeyman Memorial SP, mon objectif d’aujourd’hui. Il est 20 h 15, c’est vraiment le temps d’arrêter.

Il y a beaucoup de monde au camp des randonneurs, dont une tablée de québécois. Je me joins à eux et nous jasons tout en vaquant aux diverses tâches. Marie, de Sherbrooke, est enseignante au primaire et connaît ma collègue Caroline, une bonne amie. Mathieu et Mélanie, de Gaspé, en sont à leur premier long voyage et apprécient leur aventure. Mais la nuit tombe rapidement : Marie va dormir, Mathieu et Mélanie passent à la douche, je complète la vaisselle et l’installation alors qu’il fait de plus en plus noir.

Le camp est bien calme, à part le fort vent dans les branches. Je passe à la douche, puis je m’installe aux toilettes pour écrire : il y a de l’électricité pour l’ordi et un banc pour moi. En revanche, il est près de minuit quand je termine. La nuit fera grand bien.

km jour : 116,6
km total : 1049
départ / arrivée : 10 h 00 / 20 h 15
temps de trajet : 7 : 32
vitesse moyenne : 15,3
vitesse maximale : 54,9
camping : 5 $

Vent de rencontres

> Bullards Beach State Park (Bandon) – 65 km
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Mardi. Comme prévu, nuit calme à part quelques bruits de route. Levé vers 7 h 45, je fais un peu de lavage avant de rédiger le journal d’hier. Le ciel est d’un bleu sans partage et la température très confortable pour le moment. Je salue Anthony et je pars par l’ancienne 101 devenue sentier.

Ce trajet est un ravissement. La route étroite, assez détériorée mais facile à vélo, monte dans les bois avant d’ouvrir sur une série de très beaux points de vue.

De retour à la 101, je longe la mer jusqu’à Port Orford. Je fais l’essentiel de mon épicerie puis le combat commence. Le vent est de face, très fort, et j’avance souvent à moins de 10 km/h. En plus, je suis loin de la mer et je vais de bois en villages décrépits. Excitant…

Je croise quelques cyclistes. Je ne sais pourquoi, nous commençons à parler avec un jeune homme : anglophone, Colin vient de Montréal. Sa copine Prudence vient du Saguenay. Nous jasons un bon bout de temps au bord de la route. Ils complètent un voyage entamé l’été dernier.

Nous reprenons la route. Grâce aux arbres, ça avance un peu mieux. Plus loin, deux jeunes femmes sont arrêtées sur le gazon. Katia et Anne, deux enseignantes québécoises, en sont à leur premier long voyage à vélo. Nous jasons longuement, regardons des cartes, échangeons trucs et commentaires. Je leur donne un petit coup de main avec leur appareil photo, et nous finissons en photos de famille. Une autre belle rencontre.

Vaille que vaille, les kilomètres s’accumulent lentement, malgré le vent. En arrivant à Bandon, une affiche signale une route panoramique. Ça m’intéresse, bien sur. En arrivant aux points de vue sur la mer, je constate que le vent apporte de gros nuages. Pluie en vue ? En tout cas, c’est glacial.

En ville, je complète mon épicerie puis arrête à la boutique de vélo. J’y achète un coupe-vent jaune fluo – sécurité oblige – et une bonne carte vélo de la côte de l’Oregon. Une jeune ado me dit que sa mère parle français, et celle-ci, propriétaire de la boutique avec son mari, arrive sur les entrefaites. Originaire du Manitoba, Linda a vécu quatre ans à Montréal, s’y est impliquée dans le vélo, a même fait le Tour de l’Île. Elle retrouve son passé et le français avec ravissement.

Je suis presque à destination. Il suffit de traverser la large rivière Coquille, et ça y est. Il y a un peu d’attente pour entrer au camping, puisque un couple a des mélanges de réservation. Trois dames avec des chevaux dans une remorque viennent me parler, puis une autre dont le français est excellent. Originaire d’ici, elle a appris la langue à Paris et l’a enseigné aussi.

Le site pour randonneurs est tout neuf, avec des casiers pour la nourriture offrant aussi la recharge USB par panneau solaire. Il y a des tentes un peu partout, mais un seul jeune homme. Nick en est à son deuxième long voyage à vélo – vers le sud, évidemment – et me donne des cartes du nord de Washington. Il transporte avec lui une minuscule basse électrique aux cordes en caoutchouc. Il en joue très bien.

Nous nous séparons car il commence à y avoir un léger crachin. J’écris tant que la lumière est suffisante, puis passe à la douche. J’arrête au site de Matt et Susan, l’enseignante de français, qui m’avaient invité. C’est presque dodo, alors nous prenons rendez-vous pour demain matin. Il est près de 23 h, alors dodo au lointain son des vagues.

km jour : 64,7
km total : 932
départ / arrivée : 10 h 15 / 18 h 40
temps de trajet : 4 : 29
vitesse moyenne : 14,4
vitesse maximale : 49,5
camping : 5 $


64,7 932,0 10 : 15 > 18 : 40
14,4 49,5 4 : 29 5,00 $

À perte de vue

> Humbug Mountain State Park (Port Orford) – 85 km
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Lundi. Malgré quelques bruits industriels, j’ai très bien dormi. En revanche, mes collègues cyclistes sont peu loquaces ici. Levé vers 7 h 30, je me prépare et je prends la route vers 9 h 30 dans le brouillard.

Je passe à côté d’une solide collision entre deux voitures. Il ne devrait pas y avoir de blessés, au moins. Rapidement, il n’y a plus aucune construction et dès 10 h le brouillard s’effiloche et disparaît, dévoilant les paysages magnifiques. En Oregon, toute la côte est considérée comme parc et aménagée en conséquence. Il y a donc de nombreux belvédères et plages publics. Je ne quitte pas la route pour les points de vue : c’est déjà un bon travail d’être continuellement dans les côtes et j’ai déjà de quoi me remplir les yeux.

Après une section dans les hauteurs, je redescends vers Pistol River avant de remonter vers Cape Sebastian. Ici, pas de points de vue, que de la forêt, jusqu’à la longue plage de Gold Beach. Ici, il vente à tempête : j’avance à peine, j’ai des difficultés à garder mon équilibre et je me fais saler par les embruns. Arrivé au village, je dîne, lave mon pantalon puisqu’il devrait bien sécher, fais mon épicerie et cherche une bonne carte, sans succès sur ce point. C’est le seul village de la journée.

Ensuite, je n’ai plus de problème avec le vent : il fait tout simplement très chaud. Les points de vue sont de retour, surtout à partir de la plage d’Ophir. Pour un bout de temps, il n’y a plus d’arbres et je vois que je m’approche tranquillement de Humbug Mountain, ma destination du jour. Je retourne en forêt, et même dans l’étroite vallée d’un petit ruisseau. C’est très joli, et c’est le camping.

C’est très bien, les sites sont très beaux et c’est calme, à part le bruit de la route. Je fais mes routines. Il n’y a qu’un seul cycliste, un peu vagabond, qui se prépare à partir car il dit aimer rouler de nuit… Alors qu’il quitte, un autre arrive. Anthony est assez fatigué après une grosse étape, mais très gentil. Nous jasons un peu avant de disparaître pour la nuit. À 22 h, je suis couché.

km jour : 84,3
km total : 867,0
départ / arrivée : 9 h 30 / 18 h 30
temps de trajet : 5 : 56
vitesse moyenne : 14,2
vitesse maximale : 58,0
camping : 5 $