Moncton en pistes cyclables

> Moncton – 50 km
Sommaire

Samedi. Levé peu après 7 h, je prends du temps pour me préparer, car j’ai à réorganiser mon matériel après la pause d’hier et le séchage. Il n’y a pas eu de rosée importante cette nuit, alors ma tente est sèche. Je peux la ranger sans risque.

Encore aujourd’hui, il fait beau, chaud et venteux. J’ai le vent de face : ça n’avance pas vite. Je ne peux pas arriver à l’heure pour le mascaret de la rivière Petitcodiac, une curiosité locale. La petite route est sans histoire… et sans grand intérêt.

En arrivant au Nouveau-Brunswick, j’avais obtenu une carte de Moncton. En entrant en ville, je peux me diriger facilement. Je quitte la route pour me balader un bon bout de temps sur les pistes cyclables.

La première longe Humphrey’s Brook sur 5,6 km, un petit bout de forêt qui serpente entre les maisons et industries. Je grappille quelques framboises en passant.

Un bref passage en ville, et je suis au Parc Riverain, qui longe la rivière Petitcodiac et la traverse pour une boucle. Au début, c’est assez urbain. Je dîne en musique, car les groupes du spectacle de ce soir se préparent juste à côté. Ensuite, c’est vaste et sauvage, avec de grandes prairies inondables et de petites collines. Étonnant de se retrouver en pleine campagne si près du centre-ville.

Je reviens en zone plus urbaine et m’installe à l’ombre pour écrire. La ville fournit une connexion Internet, bien appréciée. Denise, une cycliste de passage, arrête faire un bout de causette.

En milieu d’après-midi, je m’installe dans ma confortable chambre à l’auberge, avec climatisation et salle de bain privée. Le luxe. Jacques, ingénieur à la retraite, m’accueille chaleureusement.

Après une bonne douche, une épicerie et un souper rapide, je marche vers le centre-ville pour participer à la fête des Acadiens. Comme je suis un peu en retard, je me dirige vers un itinéraire probable. Bon choix : j’arrive pile sur le grand tintamarre, joyeux, familial et coloré.

Nous arrivons au parc où est montée la scène. Avec mes précieux bouchons d’oreilles, j’écoute quelques présentations de l’Acadie Rock avant de rentrer sagement à l’auberge. La foule aussi est assez sage.

Je passe une soirée tranquille avec un retour aux informations et un film, puis je m’installe dans mon confortable lit.


km jour : 48,9
km total : 3351
départ / arrivée : 9 h 45 / 12 h 00
temps déplacement : 3 : 07
vitesse moyenne : 15,6
vitesse maximale : 38,2
gîte : 125 $

Petite virée Acadienne

> Shediac (Bouctouche) – 110 km
Sommaire

Vendredi. Ce matin, le ciel est parfaitement bleu. La journée sera chaude et venteuse. Malgré le grand nombre de campeurs, c’est calme. Comme je reste ici ce soir, je ne démonte pas ma tente et je ne charge pas mon vélo. Pourtant, je démarre lentement, plusieurs personnes viennent jaser.

Il est près de 11 h quand je pars vers le nord, pour une petite virée en Acadie. Premier arrêt à l’information touristique. Les gens sont très accueillants et acadiens. Comme il y a risque d’averses, je préfère éviter le camping demain soir, afin que ma tente soit bien sèche pour le train. Il me faut donc un hébergement. On me propose l’auberge de jeunesse, mais personne ne répond à notre appel. Je repars avec le numéro de téléphone.

Pour la route, rien de compliqué : je remonte la côte jusqu’à Bouctouche, pays de la Sagouine, puis je reviens. À l’aller, je fais le détour par la presqu’île du Cap-des-Caissie, avec ses chalets tout au long de la côte.

Le plus beau du trajet est autour de Saint-Thomas-de-Kent, un peu avant Bouctouche. La route passe presque dans la mer. Au loin, plusieurs éoliennes semblent posées sur la mer. Illusion : l’Île-du-Prince-Edouard est sous l’horizon.

Le retour se fait par le même chemin, sauf pour le Cap-des-Caissie. Balade agréable, sans être spectaculaire, très francophone, pavoisée du drapeau tricolore marqué de l’étoile jaune car ce sera demain la fête des Acadiens. Je termine la journée avec 110 km au compteur.

De retour au camping, je règle mon coucher de demain. Après plusieurs appels, j’apprends qu’il n’y a plus de place à l’auberge de jeunesse. Avec Internet, je trouve facilement une liste de gîtes. Le premier que j’appelle, avec son nom en français, a encore deux chambres pour demain. J’en réserve une.

Au souper, je dois changer la bonbonne de gaz de mon réchaud. C’est étonnant : la première bonbonne a fait tout le voyage et n’a flanché que lors du dernier repas. Toute une performance !

Il fait presque nuit quand un cycliste chargé – mais tout à l’arrière avec un sac à dos – arrive. Ian habite en Alberta et amorce une traversée du Canada d’est en ouest. Nous discutons un bout de temps à propos de son itinéraire et échangeons nos coordonnées. S’il le désire, il aura un pied à terre à Montréal. Au moment de nous quitter, il me fait un gros câlin inattendu.

J’avais constaté que les installations du camping, très fréquentées, sont un peu détériorées. Celles du bâtiment d’accueil sont bien meilleures. Je m’y rends pour Internet et la douche, mais l’envoi courriel aux amis ne fonctionne pas. Ce sera pour une autre fois. Dodo !


km jour : 108,6
km total : 3303
départ / arrivée : 10 h 45 / 18 h 15
temps déplacement : 5 : 38
vitesse moyenne : 19,2
vitesse maximale : 37,3
camping : 26 $

Un pont vers l’Acadie

> Shediac – 110 km
Sommaire

Jeudi. J’ai très bien dormi malgré le vent qui secouait ma tente. Il faut dire que le bruit des vagues est un excellent partenaire pour le sommeil.

Aujourd’hui, le ciel est gris, mais sans menace de pluie. Je dois tout ranger, car j’avais tenté hier de sécher mon matériel. Succès relatif sur ce point : si ce qui était protégé est resté sec, mes sacoches sont toujours humides.

Je quitte autour de 9 h. Il me faut arrêter en ville – heureusement, Summerside est un centre d’importance – pour l’épicerie et la carte mémoire de l’appareil photo. Tout est bientôt en ordre.

Je me dirige tranquillement vers le Pont de la Confédération, qui relie l’île au Nouveau-Brunswick. Le vent est un peu contrariant, mais je traverse quelques jolis villages et campagnes.

Bientôt, le pont devient un élément marquant du paysage : on peut parler de monument. En y arrivant, il y a une salle d’attente. Ce pont de 8 km est interdit aux vélos et aux piétons, mais est facile à franchir grâce à une navette. En arrivant, je décroche un téléphone et l’appel est automatiquement placé.

Comme j’ai une demi-heure d’attente, j’ai tout le temps d’enlever mes sacs du vélo et de dîner. Dans la salle d’attente, une dame a la conversation facile. Elle me présente un petit film tourné par son amoureux lors de la récente demande officielle de mariage, en montgolfière au-dessus de l’Afrique du Sud. Quand même. 

Le petit autobus arrive. Le conducteur, un acadien, parle bien français. À l’arrière du véhicule, un coffre fait toute la hauteur et loge facilement vélo et bagages.

De l’autre côté du pont, nous sommes sur l’Île Jourimain. L’autobus nous laisse devant le bureau dl’information touristique. J’y récolte quelques cartes, bien nécessaires. En me baladant un peu, je croise Gabriel et Camille, deux anciens élèves, et leur mère Magdalena, en voyage sur l’ÎPE. Les enfants sont devenus ados. Je reviens rapidement à la route, car les sentiers sont peu rapides et les moustiques voraces.

En quittant l’île, je roule sur la grande route avec un fort vent de face. Dès la première sortie, je prends la petite route qui longe la côte. J’ai le vent un peu plus de côté et c’est beaucoup plus calme côté voitures. Côté vues, c’est joli, sans plus. Rien de spectaculaire. Et si le ciel se dégage partiellement, il reste de bonnes bandes de nuages ici et là.

Ce n’est pas qu’ici : la tonte de la pelouse sur un petit tracteur semble être un sport national. Justement, un de ces croisés du gazon m’envoie la main et s’approche de la route. Dave est aussi adepte des voyages à vélo. Nous avons une agréable conversation dans un étrange mélange de français et d’anglais.

J’arrête à Murray Beach, un camping provincial. Il est encore tôt, mais je veux m’assurer d’une place avant de me rendre à Shediac. Par téléphone, on me confirme qu’il y aura de la place. Je repars.

La petite route devient grande. À la première occasion, je repars sur une route plus à mon goût.

À partir de Cap-Pelé, le bilinguisme fait place à l’unilinguisme français. Les maisons sont pavoisées aux couleurs de l’Acadie, puisque nous sommes à deux jours du 15 août.

Dave m’avait parlé d’environ 30 km pour Shediac, mais il devait penser en milles. La journée, avec sa lente progression, s’étire avec un vent souvent contraire. En plus, le camping est mal indiqué et je le cherche un peu.

Il y a plusieurs campings ici, mais celui-ci, parc provincial, offre une zone pour les tentes. C’est immense, sans aucune intimité entre les sites. Comme il est déjà tard, je ne fais que l’essentiel. En arrivant à l’heure de la douche, je réalise que je n’ai pas de pièce de 1 $. Ça attendra à demain matin.

Je m’installe pour deux nuits à Shediac : demain, je visiterai l’Acadie sans mes bagages.


km jour : 110,6
km total : 3194
départ / arrivée : 9 h 15 / 19 h 00
temps déplacement : 6 : 25
vitesse moyenne : 17,2
vitesse maximale : 40,3
camping : 26 $

Rouler sous la pluie

> Linkletter – 50 km
Sommaire

Mercredi. Cette nuit, la pluie est venue comme prévu, mais pas trop intense, plutôt en averses.

En me levant, je commence par un peu de couture, puisque un de mes gants est fatigué. Je réussis à démonter la tente alors que la pluie prend une pause.

Ce n’est que partie remise. Avant même que je parte, elle revient, légère. Il y a un bon vent sud-est, déstabilisant, et pas mal de circulation.

J’arrête pour une photo, mais ma batterie est vide. Avec la nouvelle batterie, l’appareil demande de formater la carte mémoire. Bogue. Je trouve un petit coin sec sous une boite aux lettres et j’enlève la carte mémoire. Tout fonctionne à nouveau, mais je ne dispose plus que de la mémoire interne de l’appareil. C’est suffisant pour compléter le voyage. Heureusement, je sauvegarde chaque soir mes photos sur l’ordinateur, sinon j’aurais tout perdu.

La pluie est parfois légère, parfois plus forte. Je choisis une route secondaire avec peu de circulation. Là, c’est le déluge. Tout est trempé ; heureusement, mon matériel est bien au sec dans mes sacs.

En arrivant à Kensington, la pluie cesse tranquillement. Au bureau d’information touristique, je tente de sécher l’intérieur de mon appareil et ma carte mémoire à l’air chaud, sans résultat. En revanche, j’ai des informations pour demain à propos de la navette du pont et sur la météo à venir – pluie et orages jusqu’en milieu de soirée. Décision : le camping provincial le plus proche sera parfait pour aujourd’hui. Je dîne et reprends la route… et la pluie, légère, mais semblant prête à revenir en force, m’accompagne doucement jusqu’au camping.

J’arrive très tôt. Je suis bien trempé. Gentiment, on m’installe dans un abri avec le bois pour les feux de camp et une table à pique-nique avec vue sur la mer. Au loin, le pont de la Confédération que je traverserai demain. Il y a de l’eau sur le plancher. Je l’éponge, mais il ne sèche pas malgré un bon courant d’air : il est probablement trop salé et absorbe l’humidité ambiante.

Je profite de l’abri pour sécher mon matériel et pour mettre à jour le journal. J’essaie d’insérer ma carte mémoire dans l’ordinateur, et lui aussi demande à la formater. Fin de la carte, probablement…

Contrairement aux prévisions, la pluie cesse et le soleil tente de timides apparitions. Comme j’ai de l’électricité, je peux facilement compléter le journal et mettre à jour les photos.

En fin d’après-midi, je passe à la douche et au souper. C’est vraiment très tranquille ici.

Comme le travail habituel est terminé, je passe au cinéma avec « Intouchables », un film que j’aime bien. Auparavant, un visiteur inattendu se présente : le soleil sort de sous les nuages pour offrir tous ses flamboiements de fin de journée.

Je termine en montant la tente devant l’abri pour une nuit que j’espère bien calme.


km jour : 51,2
km total : 3084
départ / arrivée : 9 h 30 / 13 h 45
temps déplacement : 2 : 56
vitesse moyenne : 17,5
vitesse maximale : 47,8
camping : 30 $

Dunes, falaises et horizon

> Cavendish – 70 km
Sommaire

Mardi. Après une nuit de forte rosée qui a bien trempé le double toit, le ciel est complètement dégagé. C’est une journée splendide et chaude qui commence.

Avant de partir, je règle un point important : mon retour à Montréal. Je prendrai le train à Moncton dimanche en fin de journée car il ne circule que quelques jours par semaine. Comme la transaction Web ne fonctionne pas, je dois régler par téléphone. Un avantage : c’est environ 100 $ moins cher…

Je pars donc tard avec une tente bien séchée. Aujourd’hui, le programme est léger. Le Parc national de l’ÎPE couvre trois secteurs de la côte, mais je ne visiterai pas le secteur est. À vélo, l’accès est gratuit. Ce que j’en vois est parfait avec son relief facile et un trajet exclusivement sur  pistes cyclables.

Je commence par le secteur de Brackley-Dalvay, au centre, avec ses dunes et ses longues plages. Je prends mon temps. Je profite de presque tous les points de vue.

Partout, il y a des accès à des plages magnifiques… et fréquentées, accessibles par des sentiers bien délimités. Entre la route et la mer, il y a des dunes extrêmement sensibles au piétinement, alors il est vital de guider précisément les pas des vacanciers.

Je passe à vélo sur le sentier Bubbling Springs. C’est joli, mais je ne m’arrête pratiquement pas car les moustiques y sont nombreux et voraces. Au bout de la boucle, il y a une source alimentée par des veines souterraines qui sortent à travers le sable, d’où le nom du sentier. Même chargé, mon vélo est efficace sur ce sentier un peu accidenté.

Je croise trois cyclotouristes – denrée rare cet été –, dont Michael, parti de Toronto. Il voyage léger puisqu’il ne campe pas, mais c’est un bon périple. Évidemment, nous discutons itinéraires.

En passant près d’un camping, je fais une pause eau. Une jeune femme s’approche et s’intéresse aux voyages à vélo. Nadine semble bien tentée de partir ainsi. Bonne route.

Plus loin, je fais un détour pour aller rouler sur l’Île Robinsons. En y arrivant, je jase assez longuement avec Frédéric, autre adepte du vélo. Le tout nouveau sentier de 5 km offre des obstacles pour adeptes du vélo de montagne, mais avec la charge je préfère les contourner. C’est une balade très agréable.

Pour rejoindre l’autre partie du Parc, toute proche à vol d’oiseau, il faut reprendre la route pour contourner la Baie Rustico, une affaire d’environ 20 km. En cours de route, je constate qu’une pièce de mon pédalier se dévisse. C’est une réparation très simple, vite réalisée.

Une dame s’approche pour voir si j’ai besoin d’aide. Rapidement, nos passons au français, puisque Yvonne est acadienne. Veuve et ancienne enseignante, elle s’occupe de son jardin et accueille bien le cycliste de passage.

Vers 15 h 30, je passe le seuil des 3000 km. Je bats mes records de distance en un été.

À North Rustico, je fais mon épicerie. Coincé dans le panier, mon cyclomètre se remet à zéro. Pas de statistiques aujourd’hui.

De retour dans le Parc, secteur Cavendish (ouest), je me retrouve dans un autre environnement, fait de spectaculaires falaises de grès d’un rouge étonnant, sculptées par la mer. C’est magnifique ! Je prends plusieurs photos même si le soleil se cache  tranquillement dans les nuages.

Le territoire est marqué par la mémoire de Lucy Maud Montgomery qui a trouvé ici l’inspiration pour son célèbre roman « Anne… La maison aux pignons verts » et attire toujours les foules.

Il se fait déjà tard. Malheureusement, il n’y a plus de place au camping du parc, alors je plante ma tente juste à côté dans un énorme camping trop cher. Mais la pluie s’annonce…

Il y a plusieurs québécois, certains viennent me voir, intéressés par mon périple. Je ne veille pas tard, le journal attendra. Pour le moment, la tente est sèche, mais ça ne devrait pas durer.


km jour : 69,0
km total : 3032
départ / arrivée : 10 h 30 / 19 h 00
camping : 39 $

La traversée de l’île

> Mill Cove – 90 km
Sommaire

Lundi. Le déluge a duré une bonne partie de la nuit, mais grâce au chalet, tout est bien sec. C’est agréable de dormir avec le bruit de la pluie quand on est bien à l’abri. Je fais la grasse matinée : je me lève passé 8 h.

Hier soir, j’avais laissé faire la douche – celle sur la route avait suffi –, alors je me reprends ce matin. Je révise aussi l’alignement de ma roue avant. Je pars donc un peu après 11 h. En quittant le camping, je dépasse un homme et deux jeunes enfants à vélo : Jean-Philippe, Alexandre et Phylis sont de Gatineau et aimeraient peut-être partir en cyclo-camping.

J’arrête au bureau d’information touristique. Sur place, je réalise que j’ai encore la clef du chalet. Petit aller et retour au camping : je prends vraiment la route à 11 h 40.

Il fait de plus en plus beau, mais avec le vent de face j’avance lentement. Ici, il n’y a pas de gros relief, mais ce n’est presque jamais plat. Je prends un premier repas à Pinette River, car c’est bien joli. Un cycliste chargé arrive : Ben achève la traversée du pays depuis Vancouver. Nous discutons un peu itinéraires avant de repartir. Il est seulement le quatrième cyclotouriste que je croise sur la route depuis mon départ.

Mon trajet est un peu complexe. Je veux éviter Charlottetown, car les villes sont pénibles à vélo. Après une moitié de trajet sur la route 1, la transcanadienne, très calme sauf quand le bateau y déverse ses passagers, je prends plusieurs petites routes : la 3, la 213, la 22, la 21, la 2, la 218, la 219. Plus le chiffre est petit, plus la route est importante.

Sur mon trajet, c’est très agricole et souvent coquet. Étonnamment, toutes les indications routières et toponymiques sont bilingues – anglais et français –, même si peu de gens semblent l’être.

La 213 est exigeante car elle monte légèrement, mais tout le temps, et le vent de face y est particulièrement présent. Ensuite, j’ai de bonnes montées et descentes jusqu’à Mount Stewart, où je mange près de la majestueuse Hillsborough River, la plus importante de l’île.

En cours de journée, le soleil chasse tous les nuages. La suite du trajet jusqu’au camping est facile.

Au camping – beau site au bord de l’eau –, j’ai des voisins cyclistes : une famille de Toronto avec trois enfants de six à 10 ans, en balade pour deux semaines. Je monte le camp, je mange et je m’installe dans la salle communautaire pour profiter d’Internet et écrire.

Je suis tout à côté d’un Parc National, au programme pour demain. Selon la météo, il fera très beau, mais une journée de pluie est attendue mercredi. On verra.


km jour : 89,5
km total : 2963
départ / arrivée : 11 h 05 / 18 h 30
temps déplacement : 5 : 28
vitesse moyenne : 16,3
vitesse maximale : 46,5
camping : 29 $

En attendant la pluie, rouler

> Wood Island East – 155 km > traversier – 22 km
Sommaire

Dimanche. Je m’éveille peu après 6 h. À nouveau, le ciel est bien gris et la météo prévoit de la pluie, mais c’est sec ce matin. Je range mon matériel rapidement afin qu’il reste à l’abri. Je suis donc en route peu après 7 h 30 avec l’idée de bien rouler avant la pluie et de profiter du vent de dos.

Le trajet est vallonné avec de belles vues à l’occasion. Au début, je roule sur une petite route bien tranquille, traversant de petits villages. Avant Antigonish, je fais un bout sur l’autoroute, faute d’alternative, mais je la quitte dès que possible.

En cours de route, j’étudie la carte. Le trajet suggéré après Antigonish longe la côte, mais une route alternative permet de sauver 35 km. C’est celle que je choisis. Je traverse une belle vallée aux maisons coquettes et fleuries qui mène à la côte.

Je passe un lieu nommé Doctors Brook, comme cette rivière de Terre-Neuve où nous avions photographié nos amis médecins en 1991. Arisaig, le village suivant, offre un petit parc pour pique-niquer – c’est l’heure, en plus – et de belles vues, dont je profite.

J’arrive à Lismore où une barricade indique « route barrée ». Je vais vérifier : il manque le pont sur le ruisseau. Je pourrais passer, mais il faudrait marcher dans l’eau. Avoir su, c’est ce que j’aurais fait : le long détour proposé fait 13 km, est beau mais assez montagneux.

La route me mène ensuite jusqu’à New Glasgow. C’est l’heure d’un autre repas – les kilomètres s’accumulent – et d’une épicerie. La pluie vient de commencer tranquillement et s’intensifie peu à peu alors que j’approche du traversier vers l’île-du-Prince-Edouard.

En passant sur la digue qui mène à Pictou, je dérange sans le vouloir une immense colonie de cormorans qui y est installée. Assez impressionnant. Comme je m’étais enquis de l’horaire, j’arrive sans stress bien à temps pour le départ de 18 h 15.

Une fois le vélo bien attaché sur le pont inférieur – il y a deux ponts de véhicules –, je monte au pont des passagers. Il n’est pas question de sortir, il mouille sérieusement. Pendant la traversée vers l’Île-du-Prince-Edouard, qui dure 75 minutes, je jase avec une famille de Repentigny. Lynn et Guy sont venus chercher leur fille Alexandrine qui vient de passer cinq semaines à Halifax pour peaufiner son anglais. Belle rencontre.

Quand je quitte le bateau, il est passé 19 h 30, il pleut de plus en plus… et il me faut me poser pour la nuit, après plus de 150 kilomètres au compteur.

Heureusement, j’ai déjà une carte routière de l’Île. Un parc provincial avec camping est tout près. Comme c’est le déluge, la préposée m’offre un tout petit chalet. Je n’hésite pas longtemps. C’est un peu plus cher, mais ce soir c’est le bon choix. J’ai la place pour sécher ce qui doit l’être, une table, deux chaises, de l’électricité… et j’entends la pluie crépiter sur le toit. Même mon vélo est à l’abri sur le balcon.

Je mange et m’organise à l’intérieur, ne sortant qu’une seule fois. C’est parfait comme ça : je suis en vacances. En revanche, je me couche tard puisque je suis arrivé tard.

Anecdotes. Après 155 km, je ne sens étonnamment aucune fatigue particulière et je n’arrête que parce que la nuit vient. Depuis trois ans, je n’ai pas mouillé mes souliers en randonnée, mais ce soir il s’en est fallu de peu : un ou deux kilomètres de plus après le bateau, et mes couvre chaussures auraient été submergés…


km jour : 154,3
km total : 2874
départ / arrivée : 7 h 30 / 20 h 00
temps déplacement : 8 : 14
vitesse moyenne : 18,7
vitesse maximale : 52,5
camping : 54 $

Gravier et grisaille

> Havre Boucher – 115 km
Sommaire

Samedi. C’était prévisible : la nuit a été excellente. Quand je me lève, vers 7 h, le ciel est bien gris. Comme la tente n’est que légèrement humide, je me dépêche de la mettre dans l’abri cuisine, mais la pluie ne vient pas. Il est 8 h 30 quand je prends la route.

Je fais une dizaine de kilomètres sur la transcanadienne avant de bifurquer vers le sud. Le bitume est moins beau, mais le paysage s’annonce meilleur et les autos rarissimes. C’est bien le cas. Cette route compte de nombreuses côtes, mais pas trop abruptes.

À Orangedale, tout petit village, je rate une intersection et me ramasse sur une route en gravier. C’est vraiment joli, cohérent avec la carte, mais c’est un cul-de-sac.

Je reviens sur mes pas, reprends la bonne route et constate que le pavage n’y est pas bien meilleur que le gravier. Plus loin, je roule quelques kilomètres sur un gravier bien pire que celui de mon détour, avec de la planche à laver et des trous… Je comprends pourquoi il n’y a pas de circulation.

De retour sur le pavage – pour ce qu’il en reste –, je profite de belles baies. En revanche, je dois slalomer entre les trous et les bosses. Quelle mauvaise route ! En plus, il y a beaucoup de maisons abandonnées…

D’autres sont gardées férocement. Je dois tester sur un cabot « volontaire » un système de protection des mollets cyclistes : un jet d’eau sur le museau. Il semble que ça marche, mais je devrai travailler la précision du tir.

À Marble Mountain, je dîne sur un très joli belvédère ouvrant sur la baie et les îles. Les nuages dominent malgré quelques percées de soleil. Le vent d’est m’est utile en me faisant avancer plus facilement mais annonce la pluie. Celle-ci, trop faible pour déranger, commence vers 13 h 30, tout de suite après West Bay.

Je ne roule plus près de l’eau, mais en forêt. Je rejoins une route plus importante. Il y a moins de trous mais plus de voitures. Comme les conducteurs sont courtois, ce n’est pas difficile.

J’arrive à Port Hawkesbury. Depuis tôt ce matin, je n’avais vu aucun commerce : ils sont tous ici. Je fais une épicerie. Une dame âgée, acadienne, me parle en français, une langue qu’elle semble peu pratiquer mais qu’elle aime. À la station service où le fais le plein – d’eau –, la caissière est originaire de la banlieue de Montréal. Un homme s’intéresse beaucoup à mon vélo, posant plein de questions, prenant des notes.

La pluie est plus forte, mais toujours pas problématique. Je poursuis sur un large boulevard jusqu’à la digue qui relie l’Île du Cap-Breton à la terre ferme.

Bientôt, je prends une route secondaire, puisque l’autoroute n’est pas pour moi. C’est calme, et en prime la pluie cesse. Peu après Havre Boucher, un terrain de camping. Il n’est pas tard, mais avec un ciel douteux et déjà 115 km aujourd’hui, c’est ici que j’arrête.

J’ai le temps de monter ma tente, de manger et de faire la vaisselle avant qu’un petit crachin s’installe. Je passe à la douche et j’appelle mon frère. Rien de bien spécial à Montréal.

Je m’installe dans la buanderie pour écrire. C’est souvent là que c’est le plus simple de garder l’ordinateur en charge. En revanche, la connexion Internet est assez précaire : je ne peux même pas lire mes courriels. Pas grave. En revanche, mon ordinateur installe une mise à jour, ce qui lui prend du temps. Quand je rejoins ma tente, la pluie a cessé.


km jour : 113,6
km total : 2720
départ / arrivée : 8 h 30 / 17 h 10
temps déplacement : 6 : 18
vitesse moyenne : 14,7
vitesse maximale : 54,5
camping : 23$

Bras d’Or sous le soleil

> Whycocomagh – 110 km
Sommaire

Vendredi. Sur le bateau, la nuit a été calme, mais pas très confortable pour dormir. Un fauteuil, c’est bien, mais un lit, c’est mieux.

Je m’éveille pour de bon à 8 h. Pour compenser la mauvaise nuit, il fait très beau et il en est ainsi pour toute la journée. Je déjeune à mon siège, puis Luke et moi sortons sur les passerelles pour l’accostage à North Sydney, profitant du paysage et du beau temps. Nous touchons terre vers 9 h 15 et quittons le navire.

J’arrête au bureau d’information touristique pour me changer, faire le plein d’eau et surtout pour mettre à jour les courriels, dont un envoi aux amis. La jeune préposée est très gentille et jolie. Elle me propose un itinéraire à suivre.

Arrêt suivant : l’épicerie. Mes réserves sont basses, je les remets à niveau. Je dois revenir à l’information touristique, car j’y ai oublié mes bouteilles d’eau, qui m’attendent sagement là où je les avais laissées.

Donc, je pars tard : il est 11 h 45 quand je quitte pour de bon. Je rejoins St. Andrews Channel que je vais longer une bonne partie de l’après-midi. C’est l’une des nombreuses baies du lac Bras d’Or, qui occupe le cœur de l’Île du Cap Breton.

Selon la carte, il y a une série de petits villages, mais la plupart d’entre eux n’ont aucun noyau urbain : il y a des maisons de temps en temps, et c’est tout. Je retrouve avec plaisir les indications bilingues, en anglais et en breton. En général, la route est en bonne condition, avec de  belles vues et pratiquement aucune circulation. Malgré le vent de face, ça avance bien.

À la suite d’une erreur d’aiguillage – il n’y a aucune indication –, je passe quelques kilomètres dans les bois et les côtes sur une route parallèle.

Entre Grand Narrows et Iona, il y a deux ponts, un pour la route et l’autre pour le chemin de fer. Ce dernier est ouvert en permanence pour la navigation, tandis que la route a une section qui bascule au besoin. C’est un coin très joli.

Ici, à Iona, j’ai deux options. Je pourrais prendre la route principale, plus directe, ou passer par la pointe est de la presqu’île. Ça semble plus beau, c’est mon choix. C’est bon : il y beaucoup de belles vues et aucune circulation. Je note un petit parc qui met en valeur d’étranges falaises blanches, de belles anses, puis une grosse montée suivie d’une descente équivalente sur une très mauvaise chaussée, puis le retour le long de baies illuminées de soleil. Un beau détour.

Pour poursuivre ma route, il y a un petit traversier qui court le long d’un câble entre les deux rives. C’est très rapide, moins de trois minutes.

Ensuite, je roule sur la transcanadienne. Maintenant, il y a de la circulation, mais aussi un bon accotement. Je passe devant un camping, mais ça ne semble pas être celui que j’attends. Effectivement, quelques minutes plus tard, j’arrive dans un joli parc provincial. Il est temps, il est déjà passé 19 h.

Les formalités sont inattendues : je pourrais payer directement avec la somme exacte – que je n’ai pas –, par Internet ou par téléphone par une ligne dédiée. C’est l’option que je choisis. Après un essai infructueux, je parle à Marilyn, une québécoise adepte du cyclotourisme. Tout s’arrange facilement, malgré un tarif excessif.

Je plante ma tente à l’emplacement choisi, très bien à tous points de vue. Je mange puis m’installe sur une sécheuse pour écrire le journal tout en rechargeant mon ordinateur. Ensuite, c’est la douche et le dodo. Je pense que je vais très bien dormir…


km jour : 111,4
km total : 2606
départ / arrivée : 11 h 45 / 19 h 15
temps déplacement : 6 : 30
vitesse moyenne : 17,1
vitesse maximale : 65,0
camping : 27 $

Un navire dans le brouillard

> Argentia – 3,3 km > Sydney (traversier) – 425 km
Sommaire

Jeudi. Finalement, il n’a pas plu sérieusement mais le brouillard est omniprésent. Je me lève à 9 h 45, un record de grasse matinée depuis que je suis en route. La tente est presque sèche, alors je m’empresse de la ranger. Je charge le vélo, je déjeune tranquillement et je suis au terminus maritime dès 11 h 35. Pas trop stressant.

Pour le moment, Internet ne fonctionne pas, alors il est impossible de compléter les formalités pour l’accès à bord. Je me replonge enfin dans un texte signé Roger, sa thèse de maîtrise, que je goûte : beau travail, bien intéressant.

Le brouillard est dense : on voit à peine l’énorme bateau amarré juste devant. Plus tard, le brouillard lève un peu à la faveur de la pluie, puis revient pour rester. La pluie finit par arrêter, mais nous restons tranquillement à l’intérieur.

Je suis avec Luke. Parfois, nous discutons, parfois nous nous occupons chacun de notre côté. Je travaille un peu sur le carnet de chants, un projet que j’ai hâte de terminer mais qui prend du temps.

Internet ne redémarre pas. Les employées doivent faire tout le travail à la main, ce qui prend beaucoup plus de temps que normalement. Je reçois enfin une carte d’embarquement normale, mais il est plus de 17 h 30 quand je monte à bord. Je fixe mon vélo sur un côté du bateau avec ma propre corde, puis je monte afin de trouver un siège, puisque je n’ai pas de cabine. Ce n’est pas simple, mais Luke m’a gardé une place dans un des petits salons où il est possible de passer la nuit dans de bons fauteuils. Merci !

Il est 18 h 40 quand nous appareillons. Le brouillard reste dense, même si le soleil fait une fugitive apparition à 18 h 49. Ensuite, c’est à peine si on devine la mer sur laquelle nous voguons.

La nuit tombe tranquillement, la navigation est calme, tout comme le salon où nous sommes installés. À bord, les prises de courant sont au format européen, donc je ne peux brancher mon ordinateur, mais la batterie est pleine. J’avance donc bien dans la mise en page du carnet de chants, jusqu’à ce que la batterie soit presque vide. C’est maintenant l’heure de dormir, il est 22 h 30. Bonne nuit.


km jour : 3,3
km total : 2494
temps déplacement : 0 : 10
vitesse moyenne : 19,8
vitesse maximale : 37,8
traversier : 148 $