Villages photogéniques

> Tivissa (La Ribera d’Ebre) – 95 km
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Mardi. Mouillée hier soir, la tente est bien sèche ce matin. Avant de quitter, je discute campings et itinéraires avec le proprio, toujours de bon conseil. À 10 h 15, je roule.

Le temps reste gris, plus frais – un peu sous les 30° –, mais aucune menace de pluie n’est en vue. Aujourd’hui, une bonne partie du trajet est connue : après Torre del Compte – l’épicerie est ouverte et j’en profite –, j’entre sur la Via Verda, toujours splendide.

Il y deux nouveautés par rapport à la semaine dernière : un soleil plus généreux, et des mûres prêtes à être dégustées. Sinon, les points de vue sont nombreux. Je prends un peu moins de photos, mais c’est de toute beauté, spécialement dans les gorges de la Canaletes.

La section d’aujourd’hui compte deux bonnes douzaines de tunnels. J’apprécie ma frontale, surtout quand l’éclairage automatique ne fonctionne pas.

Je quitte ce paradis du vélo à l’ancienne gare de El Pinell de Brai, en ruines comme la majorité des bâtiments liés au train. Je ne suis pas encore au village : il faut franchir 6 km et un petit col. Ça reste de toute beauté, tout comme le village que je traverse.

La petite route qui mène à Miravet, le village suivant, est très tranquille. Après une courte montée et un plateau, une longue descente amène sur les bords de l’Ebre. C’est assez spectaculaire : comme souvent, un château domine la place, mais en plus l’église et l’ancien village sont accrochés à un cap qui plonge directement dans l’eau.

Il me faut traverser l’Ebre, mais point de pont ici : c’est plutôt un bac très ancien qui passe d’une rive à l’autre, constitué de deux barques liées par une plate-forme où trois petites voitures sont à l’étroit. Aucune mécanique : tout fonctionne avec le courant et des bras. Système très écolo, efficace et un peu folklorique.

À 17 h, je suis à Ginestar, où un camping est annoncé. Après seulement 75 km, je souhaiterais continuer, mais le prochain camping sur mon itinéraire est au moins à 50 km de routes de montagne, bien trop loin pour le temps disponible. À 17 h 45, je reprends la route, n’ayant jamais trouvé le fameux camping.

Je dois donc m’écarter de mon chemin de plusieurs kilomètres et d’un dénivelé considérable pour me retrouver à Tivissa, autre village très photogénique.

Depuis plusieurs jours, le sol est si durci qu’il est pratiquement impossible de planter des piquets de tente, et ici c’est encore pire car il n’y a pas d’arbre bien situé pour m’y attacher. Je bricole avec une corde coincée entre deux briques, une clôture et des pierres : tout tient quand même.

J’ai des voisins français avec qui parler un peu, mais j’ai besoin de repos, comme leurs enfants, alors nous ne jasons pas trop tard. Luxe suprême : je dispose d’une table pour écrire. C’est bien confortable, malgré la musique aussi bruyante que la grappe de préados. Je termine tôt, ce qui me permet de me coucher tôt et d’envisager une bonne et longue nuit.


km jour : 92,7
km total : 3268
départ / arrivée : 10 h 15 / 19 h 30
temps déplacement : 6 : 15
vitesse moyenne : 14,8
vitesse maximale : 49,5
camping : 11,50 €

Le haut fourneau

> La Fresneda (Teruel) – 120 km
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Lundi. Levé vers 7 h 15, je suis prêt à 9 h. Passant acheter une baguette à l’accueil, j’y croise la jeune Manon, connue la semaine dernière. Évidemment, je passe saluer la famille, toujours aussi sympathique. Je suis donc en route à 9 h 15.

Je roule les premiers kilomètres sur une petite route facile et calme avant de rejoindre la N-232. Là, il y a pas mal plus de circulation, mais un bon accotement. Ça monte régulièrement, avec une petite descente à l’occasion.

Surtout, c’est bien chaud, avec un thermomètre qui se tient entre 30° et 35° toute la journée. Le soleil plombe et mes bouteilles se vident plutôt rapidement même si je ménage mon eau pour me rendre au prochain ravitaillement. En revanche, je profite régulièrement des mûres, délicieuses mais dangereuses avec un plant épineux de partout.

Comme prévu, les paysages sont très beaux et très ouverts : plus je monte, plus la végétation diminue en taille et en verdure. Je longe un bout de temps la large rivière de Cervera, complètement à sec comme pratiquement tous les cours d’eau de la région. Impressionnant.

Vers midi, ça commence à monter plus sérieusement. Après un pont étroit, des lacets, puis un beau petit col comme je les aime. Il n’est ni très haut ni difficile, mais c’est franchement magnifique. Une différence par rapport aux autres cols : tout est sec, il n’y a pas d’eau nulle part. Mais plusieurs automobilistes m’encouragent au passage, un soutien apprécié.

Après un petit plateau et une bonne descente, c’est Morella. Wow ! Juchée sur une bonne colline, la ville est dominée par un énorme château médiéval et cernée d’une impressionnante fortification. Il y a même des sections de ce qui semble être un aqueduc romain. Je refais le plein d’eau à une station service, mais l’épicerie est fermée pour le moment.

J’ai tout le temps d’admirer la ville, car elle est au pied d’une montée de quelques kilomètres. Sur la crête, des éoliennes à perte de vue. Et après, toute une descente ! La route est belle, le vent me pousse et j’y atteins 69,3 km/h, non sans une pensée pour Pierre-Andrea, autre fils de mes amis Jean-Pierre et Diane, qui a récemment chuté en vélo à haute vitesse pour se ramasser à l’hôpital.

Je me rends intact en bas de la côte. Là, la route est en reconstruction, mais ça ne dérange pas puisque l’ancienne est toujours en place, étroite, sinueuse mais bien pavée.

Prochain village : Montroyo. Plein d’eau, bien sûr, mais épicerie fermée. Problème : mes réserves sont basses. Je quitte la N-232 pour la A-1414, une route régionale. Elle commence par une rapide descente, puis un bout de vallée et une bonne montée. Et on recommence. Toujours, les paysages sont magnifiques, mais le temps avance et je m’inquiète pour la bouffe.

À Fuentespalda, un passant confirme mes inquiétudes : c’est jour de fête nationale. Vais-je jeûner ce soir? En attendant, une plus grosse montée, puis une grande descente me mènent dans une autre vallée et à Valderrobres, village magnifique lui aussi.

Toujours, l’épicerie est fermée. En approchant du centre touristique, je croise des gens avec un sac de victuailles. Un gros dépanneur est ouvert : j’y achète l’essentiel.

Le ciel s’est couvert et des averses circulent un peu partout. Je croise l’entrée du camping local, mais je décide de poursuivre jusqu’à celui de La Fresneda, que j’avais bien apprécié. Bon plan : l’accueil est toujours à la hauteur, ma place dans le stationnement est disponible et la pluie n’est pas encore arrivée.

J’ai le temps de tout installer et de manger alors que quelques éclairs illuminent le ciel maintenant bien noir. Ensuite, je suis à l’intérieur pour vaisselle, douche et journal. En revanche, pas de rencontre notable ce soir. Quand tout est complété, je retrouve ma tente, humide à l’extérieur, sèche à l’intérieur, avec délices.


km jour : 119,3
km total : 3176
départ / arrivée : 9 h 15 / 20 h 45
temps déplacement : 8 : 03
vitesse moyenne : 14,8
vitesse maximale : 69,3
camping : 13,65 €

Trois pour le prix d’un

> Càlig (Castellò) – train + 25 km
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Dimanche. Jour de départ. Couchés tard, tous se lèvent tard, évidemment. Ce matin, je prépare tout mon matériel – il s’agit de ne rien oublier – et je fais un envoi de nouvelles et photos sur les plates-formes habituelles. Je confirme également mon rendez-vous de jeudi à Barcelone avec Enrique. Mon amie Virginie est de retour de vacances en Aragon, où j’étais ces derniers jours, et vient de se reconnecter chez elle, dans le Gers. Cette année, nous nous sommes manqués : je pourrai la visiter une prochaine fois.

Les autres gars de la maison sont déjà partis dans une aventure intergalactique virtuelle, il ne sont guère présents sur terre que lors des repas, et encore.

Au menu ce midi : des sardines achetées hier au marché. Ségo et Tom, soutenus par Internet, se lancent dans une complexe opération de préparation. Le résultat est convainquant pour les adultes, mais beaucoup moins pour les enfants.

C’est déjà le temps de se saluer. Je prends la route sous un soleil rayonnant – comme toujours ici – et il fait « frais », à peine 28°.

Ségo m’a imprimé une carte, qui me guide à peu près dans la bonne direction. J’ai quelques hésitations, mais j’arrive à la gare… 10 minutes avant le départ du train. C’est tout juste suffisant pour acheter mon billet – en espagnol – et pour monter à bord. Tout se passe bien, il y a peu de monde et je peux laisser mon vélo tout monté à proximité. Deux heures de pause, bien plus qu’il n’en faut pour compléter le journal. Ce n’est pas cher : moins de 12 € pour me donner deux jours de plus.

Après 45 minutes, le train s’arrête entre deux gares… et ne repart plus, malgré les efforts du personnel. 45 autres minutes, et ils nous indiquent qu’un autre train viendra nous prendre. Quand ce train arrive enfin, une passerelle permet de passer de l’un à l’autre, mais dans un autre wagon. Mon vélo ne passe pas entre les sièges, alors deux employés le prennent en charge pendant que je transporte deux sacoches et la guitare.

Le nouveau train, bien plus petit, est bondé. Je suis donc debout avec mon vélo jusqu’à Castellón. Là, nous descendons et attendons un troisième train jusqu’à 17 h 40. Entre montagnes et mer, de village en village, le trajet jusqu’à Benicarló redevient agréable et confortable. Vive le train, quand il fonctionne !

J’en descends avec deux heures de retard. Heureusement, rien ne presse aujourd’hui, il est encore tôt et je ne suis qu’à 10 km du camping, sans grand dénivelé.

J’arrive donc tôt. L’accueil est chaleureux, mais j’ai peu de contacts avec mes voisins. Je peux ainsi tout terminer assez rapidement et me coucher tôt alors que la fraîcheur s’installe sous une belle lune.


km jour : 26,4
km total : 3056
départ / arrivée : 13 h 00 / 19 h 15
temps déplacement : 1 : 45
vitesse moyenne : 15,1
vitesse maximale : 39,4
camping : 15,00 €

Marché, plage et guitare

Paterna (València)
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Samedi. Un lit dans une maison, c’est quand même confortable. Je profite donc d’une bonne nuit de repos.

Le lever des uns et des autres se fait en ordre dispersé, les amateurs de jeux vidéo ayant veillé tard. Ici, tous les repas se prennent sur la terrasse, à moins qu’il ne fasse trop chaud. Ce n’est pas le cas actuellement, le mercure flirtant plutôt avec les 30° que les 40° habituels en cette saison.

En avant-midi, Ségo, Manina et moi nous rendons au Marché Central de València. C’est une épopée dans les couleurs, les odeurs et les ambiances alimentaires : il y a des fruits, des légumes, des viandes, des fromages, des noix, des poissons, des pâtisseries, etc. C’est varié, appétissant, souvent étonnant. Nous en ramenons de quoi sustenter la famille.

En avant-midi, Ségo, Manina et moi nous rendons au Marché Central de València. C’est une épopée dans les couleurs, les odeurs et les ambiances alimentaires : il y a des fruits, des légumes, des viandes, des fromages, des noix, des poissons, des pâtisseries, etc. C’est varié, appétissant, souvent étonnant. Nous en ramenons de quoi sustenter la famille.

En début d’après-midi, Manina part pour Toulouse avec Guilhem et Maël, avant de rentrer chez elle à Nantes. Les garçons passeront quelques jours avec les parents de leur mère avant de revenir en Corse, où ils rejoindront leurs parents.

Plus tard, toute la famille se rend à la plage de Sagunto. Le sable est blanc et fin, l’eau chaude, les vagues amusantes et la plupart des estivants se font rôtir assez systématiquement. Je passe l’essentiel de mon temps à l’eau, d’abord au large avec Ségo, puis dans les vagues avec Soetkin. Très agréable.

Sur le chemin du retour, nous visitons un peu le València des installations de prestige. Étonnant que cette ville du désert soit si verdoyante : déjà, les romains y avaient construit des aqueducs efficaces toujours maintenus et améliorés.

Ici, les repas se prennent tard, quand la chaleur a un peu baissé. En soirée, Ségo et moi, avec Soetkin, renouons avec guitare et chanson, un de nos plaisirs de longue date. En fin de journée, je reçois un message confirmant mon hébergement pour Barcelone. Je dormirai bien, à nouveau.

Au bout du labyrinthe

> Paterna (València) – 75 km
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Vendredi. Excellent choix pour le camping. J’entendais à peine l’autoroute, pourtant toute proche. Un petit dérangement, quand même : à 5 h pile, le système d’arrosage pour les orangers se met en marche, sans toucher ma tente. Levé à 7 h, je quitte à 8 h pour La Vilavella afin de déjeuner et de refaire mes réserves d’eau, essentielles ici.

Je roule donc pour de bon à partir de 9 h. Le trajet s’annonce complexe car je me dirige vers un nœud d’autoroutes.

En sortant de La Vall d’Uxiò, je m’informe auprès de deux policiers. Je dois simplement suivre la route N-340. C’est assez simple jusqu’à Sagunto, mais pas très intéressant : c’est plutôt plat, les zones cultivées alternant avec les industries et commerces.

Depuis un bout de temps, mon vélo a recommencé à louvoyer quand ma vitesse est entre 20 et 35 km/h. Une inspiration, une correction : les attaches de ma nouvelle sacoche, achetée à Bergerac, ne sont pas très solides, alors je la stabilise avec ma corde à linge. Et ça marche !

Sortir de la ville de Sagunto est épique : il faut emprunter des bretelles d’autoroute puis une voie de service précaire pour enfin émerger à Puçol. Ouf !

À La Pobla de Farnals, je m’arrête pour dîner et écrire, une bonne pause de deux heures alors que la chaleur est à son maximum.

Il ne me reste, en théorie, que 15 km, mais je n’ai aucune carte précise. À Museros, je bifurque vers Montcada, que je rejoins malgré un détour non fléché. Ensuite, je roule à l’estime. Je traverse quartiers résidentiels, industriels, commerciaux, pour aboutir sur un grand boulevard qui redescend vers Valence, cherchant à rejoindre Paterna.

Enfin, un boulevard vers la droite, vers Paterna. Le compteur en profite pour indiquer 3000 km depuis le départ. Mais le boulevard se transforme en autoroute. Je prends la première sortie, vers Paterna, pour me retrouver sur une autre autoroute. Ayoye. À nouveau, je sors au plus vite.

Je suis à Paterna, près d’un grand cimetière, mais je ne sais pas où aller. Après quelques demandes d’informations infructueuses, le tenancier d’une pizzeria me donne une carte de la ville et des indications. Il suffit d’aller vers la Caňada, leur quartier. J’arrive enfin chez mes amis, peu après 18 h.

Tom et Ségolène louent une grande maison blanche entourée de palmiers – l’un d’eux est planté au milieu de la grande piscine –, mais ils déménageront à Lyon dans quelques jour. Ils ont quatre enfants : Arnaud, Yann, Raphaël et la petite Soetkin.

Je ne suis pas le seul invité : Manina Laurence est là avec Guilhem et Maël, fils du frère de Ségo. La piscine est populaire auprès des jeunes, puis le repas auprès de tous. En soirée, les jeunes et Tom sont requis par divers écrans.

Ségo, Manina et moi profitons d’une balade nocturne dans la vieille ville de Valencia, animée et magnifique avec ses édifices anciens. Nous en profitons bien avant de rentrer pour un bon dodo. Auparavant, j’envoie une demande pour un hébergement cycliste à Barcelone. À suivre, mais après une bonne nuit.


km jour : 74,6
km total : 3033
départ / arrivée : 8 h 10 / 18 h 05
temps déplacement : 4 : 49
vitesse moyenne : 15,5
vitesse maximale : 37,9

Les métamorphoses de la CV-10

> Artana (Castellò) – 120 km
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Jeudi. Encore une nuit calme et confortable. Levé quand même tôt, j’ai de belles conversations avec plusieurs voisins. En plus de Nicolas et Nathalie, je rencontre Bruno et Corine, venus d’un village près de l’Isle-Adam, dans l’Oise. Ils ont trois filles de 10 à 3 ans : Manon, Télia et Cassy. Comme Télia aura 7 ans dimanche, je lui chante « C’est à ton tour » à la guitare. Agréable, mémorable.

Je prends donc la route vers 11 h, ayant envoyé au camping La Fresnada les photos de Ian, puisque je n’ai pas son courriel.

Je pars dans la mauvaise direction, vers la mer. Hier, j’étais arrivé de nuit sans veiller aux détails de l’itinéraire. Ça me vaut un joli détour de quelques kilomètres.

Revenu rapidement sur la bonne voie, je vais d’abord vers Cervera, en haut d’une solide montée, et offrant de belles vues. La route poursuit en hauteur avant de traverser un long pont au dessus d’une large rivière… complètement asséchée. La région est franchement aride.

Après Sant Mateu, je roule sur la CV-10 dans une large vallée où les herbes sèches alternent avec les cultures irriguées et les villages. J’y entre régulièrement pour faire le plein d’eau et prendre des pauses à l’ombre.

En arrivant à Cabanes, ma route devient autoroute, ce que ma carte ancienne n’indique pas. Je n’ai d’autre choix que d’entrer en ville. Il y a une épicerie – Yé ! – qui vend de la soie dentaire, denrée rare ici – re-yé ! La mienne était disparue à la gare de Lyon.

En sortant de Cabanes, il y a une piste cyclable aménagée le long de l’autoroute. Parfois un peu difficile à suivre, avec trois petites descentes à 17 % que je n’aurais pas montées sur deux roues, mais en général très fonctionnelle, elle me mène jusqu’à l’intersection vers Eslida et le camping suggéré.

Il est déjà passé 21 h, la nuit tombe, et le camping est à 10 km. Je me choisis donc une orangeraie paisible pour y passer la nuit.


km jour : 119,2
km total : 2959
départ / arrivée : 11 h 15 / 21 h 15
temps déplacement : 7 : 29
vitesse moyenne : 15,9
vitesse maximale : 53,0

La Via Verda

> Càlig (Castellò) – 140 km
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Mercredi. Il a plu légèrement pendant une partie de la nuit. Ça a très bien dormi. Au matin, ma tente est presque sèche, mais le ciel reste gris pour la journée. C’est aussi relativement frais, un avantage certain et apprécié.

En discutant itinéraire avec le propriétaire du camping, il me donne une carte usagée couvrant de la France jusqu’à Valence, un cadeau inestimable. Il me fournit également un dépliant illustrant la Via Verda, mon itinéraire d’aujourd’hui. Évidemment, je salue mes amis avant le départ, un peu tardif puisqu’il est plus de 11 h.

Pour accéder à l’ancienne voie ferrée convertie en piste cyclable, il faut passer par le village de Torre del Compte, avec quelques montées et descentes. La piste est pavée – qualité assez variable – et très bien signalée.

Au début, c’est très tranquille et ça monte doucement jusqu’à Vall-de-Roures, point le plus élevé du trajet. Pendant une brève pause repas, deux couples s’y font déposer par des camionnettes afin de descendre sans avoir eu à monter.

Et ça descend longtemps, puisque je roule sur cette piste pour plus de 60 km. Les paysages de plus en plus spectaculaires se succèdent en s’approchant des montagnes. C’est un peu étrange de descendre vers ce mur de pierre en sachant que je n’aurai pas à le remonter, mais que je passerai au travers.

La traversée se fait par quelques dizaines de tunnels – habituellement éclairés, mais pas toujours – et de viaducs, essentiellement par les gorges de la rivière Canaletes. C’est l’un des plus beaux passages du voyage, et il y a foule dans les sections les plus impressionnantes. Vers la fin des gorges, je rattrape Ian et sa famille, très heureux de leur balade.

La fin du trajet sur piste se fait le long de l’Ebre, jusqu’à Tortosa. Là, j’y fais une épicerie alors que le soleil sort. Mais il est tard, près de 18 h, avec plus de 50 km à parcourir. Je choisis de jolies petites routes, les plus directes, et il est près de 22 h quand j’arrive enfin au camping, à la fin d’une journée de plus de 140 km.

L’Orangeraie est un petit bout de France en Espagne. Les propriétaires et la majorité de la clientèle sont issus de l’Hexagone et je peux ressortir la langue de Vignault qui rencontre celle de Molière.

Mes voisins de site, Nicolas et Nathalie, m’accueillent très chaleureusement et m’offrent de leur excellent riz pour souper. Et, surprise, Nathalie connaît bien mon ami Jean-Marie, le papa de Catherine, rencontré début juillet. Le monde est petit. Et la nuit fera grand bien.


km jour : 140,1
km total : 2839
départ / arrivée : 10 h 40 / 21 h 50
temps déplacement : 8 : 35
vitesse moyenne : 16,3
vitesse maximale : 47,6
camping : 15,00 €

De la pluie dans le désert

> La Fresneda (Teruel) – 100 km
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Mardi. Finalement, la nuit a été confortable, pas trop chaude. Je me lève tôt afin de rouler avant la grande chaleur. Au moment où je remplis mes bouteilles, un campeur m’indique que l’eau du camping est non-potable. Je la bois depuis hier. En tout cas, dès 8 h 30 je suis en ville. L’épicerie ouvre à 9 h… Je me mets en quête d’une fontaine, toutes sont hors service, mais j’en trouve finalement une dans un parc. Je change mon eau, puis je me dirige à l’épicerie pour m’assurer de provisions suffisantes.

Il est 9 h 30 quand je pars pour vrai. Il fait déjà chaud, et ça ne fait que commencer.

Je longe brièvement les cours d’eau – ici, le Segre se jette dans l’Ebre – au pied d’un château impressionnant. C’est très sec, la végétation basse est jaunie, seuls les arbres ont maintenu un peu de vert.

J’approche d’un grand barrage sur l’Ebre. La route commence à monter, pour 10 km, redescend pour cinq autres, puis petites montées et descentes se succèdent avec un bon vent de face. Je roule dans une région très aride, où l’eau est visiblement rare. C’est splendide. À part la route, excellente, les seules traces humaines sont des ruines de bâtiments et quelques cultures et chemins.

J’arrive à Caspe. J’ai besoin d’eau, et un parc à l’entrée de la ville offre fontaine et ombre, dont je profite avant de reprendre la route sous un ciel qui se couvre tranquillement.

C’est à nouveau le quasi désert jusqu’à Alcaňiz, où Google indique un camping. Mais l’histoire se répète : il est fermé, l’alternative la plus rapprochée est à 25 km. Surtout, la pluie semble s’approcher.

Je pars rapidement et je pousse fort sur les pédales. Une grande route, une plus petite, le village, encore deux kilomètres, une affiche indiquant le camping comme complet, 600 m de gravier et j’y suis.

La dame, très chaleureuse, me dit avoir toujours de la place pour les cyclistes. Le temps de m’inscrire pour le plus bas tarif du voyage – pour l’un des meilleurs campings – et la pluie arrive en force.

Je mets mon vélo à l’abri dans l’espace vaisselle et y monte ma tente pendant un moment où il n’y a personne avant d’aller l’installer. Ici, tous se parlent – en anglais – et les rencontres se multiplient. Bas, un hollandais ayant déjà voyagé à vélo, me prête des cartes afin que je les photographie et me conseille des itinéraires.

Comme la pluie se poursuit, je cuisine dans l’espace vaisselle. Ian, anglais et triathlète, me donne une banane et des barres d’énergie ; j’ai aussi d’excellentes conversations avec d’autres campeurs. Quand je me couche, la pluie a diminué mais se poursuit. Ça va bien dormir.


km jour : 102,0
km total : 2699
départ / arrivée : 8 h 20 / 19 h 20
temps déplacement : 7 : 20
vitesse moyenne : 13,8
vitesse maximale : 59,4
camping : 5,50 €

Congé mécanique cuisant

> Mequinenza (Aragón) – 35 km
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Lundi. Levé à 8 h, je constate que le sol est resté chaud sous la tente. Je ne prévois plus avoir froid… Ce matin, je prends mon temps. Je profite de l’électricité pour charger autant que possible mes appareils, et il est 11 h quand je pars, en quête de carte, de camping et de ravitaillement.

Il fait déjà très chaud et le soleil brille sans partage. Je descends l’abrupte côte vers Fraga sur les freins. La ville ancienne, alanguie sous la chaleur, est vraiment belle. J’y trouve des fruits et une affiche indiquant un camping à Mequinenza, 25 km plus au sud. Parfait : le congé prévu hier sera pour aujourd’hui.

J’ai le choix entre deux routes : je choisis la plus petite, sur la rive est de El Cinca, celle où il n’y a pratiquement aucune circulation. Très bon choix.

C’est splendide. Si la vallée et les zones irriguées sont vertes, tout le reste est jauni. Par moments, je passe au pied de falaises ocres ; ailleurs, ce sont des vergers à perte de vue. La vallée est cernée de montagnes désertiques. Parfois, de petits chemins de terre s’élèvent vers les hauteurs. Et moi qui craignais d’en avoir fini avec les montagnes…

Je traverse deux villages. Au premier, je complète mes courses ; au deuxième, je mange à l’ombre et remplis mes gourdes. Entre-temps, El Cinca a rejoint El Segre, maintenant bien loin du torrent de ses débuts. Tout au long du trajet, je prends de nombreuses photos.

Peu après 14 h 30, j’arrive au camping. Il fait 37° à l’ombre, c’est pire au soleil. Oh là là ! Je m’installe, mais ne me repose pas : mon vélo a besoin d’entretien. Plus précisément, je dois changer les plaquettes de mes freins à disque, une opération nouvelle pour moi. J’y mets le temps – à l’ombre – et tout se passe bien. Je termine avec le vélo par une virée en ville à la recherche d’une carte. Rien.

De retour, je prends une douche et je me mets au journal tout en chargeant l’ordinateur, qui réclame sa dose d’électricité. Il fait vraiment très chaud partout. Je peux ainsi compléter le journal, préparer une sélection de photos et tout mettre en ligne, car la connexion Internet est excellente.

Je mange donc tard, après le coucher du soleil, mais avec une vue splendide sur le lac, la vallée et le coucher de la lune. Même si une certaine fraîcheur commence à se faire sentir, je prends une nouvelle douche avant le dodo.


km jour : 35,2
km total : 2597
départ / arrivée : 11 h 000 / 14 h 45
temps déplacement : 2 : 36
vitesse moyenne : 13,5
vitesse maximale : 26,7
camping : 15,00 €

Où est le camping ?

> Fraga (Zaragoza) – 115 km
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Dimanche. Nuit fraîche et humide pour le double toit, qui séchera ce soir. Je suis debout à 7 h et je termine la mise à jour du journal, arrêtée hier faute de lumière. Je n’ai qu’un seul visiteur, un homme gentil qui me raconte une histoire en espagnol que je ne comprends pas. À 9 h 15, je prends la route.

Je reviens au village de Ponts afin de consulter Internet, reconnecté ce matin. En plus des courriels, je découvre une information précieuse : Google annonce un camping à Lleida, ce qui me ferait une journée de 70 km, un vrai congé. C’est parfait pour moi : j’y vais.

Je profite aussi de la boulangerie pour le pain et de la fontaine pour refaire le plein d’eau – ici, je n’en ai jamais trop. Malheureusement, comme c’est dimanche, l’épicerie est fermée. Elle ouvre au moment où je me prépare à partir, alors je peux commencer mon trajet avec l’essentiel pour la journée.

Il n’y a toujours qu’une seule route, facile et large, avec de longues montées et descentes. Les villages perchés se succèdent, spectaculaires, mais la route les contourne : il faut faire un détour pour y entrer. Je fais ce détour à Artesa de Segre.

À côté de Foradada, un groupe de cyclistes lycra est en balade et nous échangeons dans un français minimal, mais chaleureusement. À Cubells, il y a enfin une option à la route principale : un petit chemin tortueux descend vers Montgai. Le trajet est vraiment joli, et je profite de l’ombre d’un mur pour manger un peu : le soleil est vraiment violent.

 Vers Balager, une ville plus importante autour de laquelle les industries sont nombreuses, et plus loin, la route n’a presque plus de relief. Je vois s’éloigner les montagnes avec nostalgie.

J’arrive à Lleida vers 16 h 30, après une journée bien raisonnable d’à peine 75 km, et je me mets à la recherche du camping. En pure perte : il n’y en a pas, il n’y a à l’adresse indiquée qu’un bureau – fermé, évidemment – fédérant les hébergements de la région. Que faire ? Les batteries de mes appareils sont en baisse, une douche serait plus qu’appréciée et je sens la fatigue.

Deux jeunes cyclistes de Barcelone font le plein d’eau tout près. Ils prévoient se rendre à Fraga, 25 km plus loin, où il y a un camping. C’est reparti.

À la sortie de la ville, une flèche indique un itinéraire cyclable vers un village où je dois passer. La route qui serpente entre les arbres fruitiers est jolie, tranquille et rapide… mais se détériore pour devenir mauvais gravier. Je m’informe, et je reviens sur mes pas pour reprendre la route principale.

Là, nouvel obstacle : selon la carte, je devrais passer sur une autoroute, ce qui est interdit et assez dangereux. On verra.

Pour un bout, je roule sur une voie de service. Quand elle se termine, une affiche indique un itinéraire vélo/rando par une petite route goudronnée. Le goudron ne dure qu’un temps, et une solide montée sur un gravier rond qui fait déraper mon vélo se révèle être la seule option. En haut, le goudron est de retour pour la descente vers la voie de service.

Et ça remonte pour passer en haut d’une colline par un petit tunnel et redescendre vers un paysage de western. Une série de flèches indiquent le camping. Après une cour d’usine, le chemin passe à flanc de montagne pour aboutir sur un petit plateau avec vue sur la vallée.

Je m’installe et je fais le minimum requis – repas, douche, lavage et archivage des photos – avant de me coucher dans une tente encore chaude.


km jour : 118,2
km total : 2562
départ / arrivée : 9 h 15 / 20 h 45
temps déplacement : 7 : 27
vitesse moyenne : 15,8
vitesse maximale : 45,8
camping : 13,65 €