Anticosti
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Si nous nous levons bien tôt, nous quittons vers 6h45, soit plus tard que prévu. Ce matin, il fait encore très beau, même si des averses sont attendues en après-midi.
En sortant du village, petite pause pour changer certains passagers de siège : Gaëlle et Alice réalisent le fantasme de voyager dans la caisse d’un « pick-up », affichant des sourires rayonnants et poussiéreux.
Les distances sont importantes sur l’île, la route de terre est praticable, mais avec des passages plus difficiles. Avec mon précieux chargement, je conduis prudemment, surtout que le vieux camion pas mal abîmé a une tenue de route approximative et des commandes erratiques. Enfin, il roule. Heureusement, le véhicule conduit par Javier est en meilleure condition.
Premier arrêt, après 115 km : le camp Macdonald, poste d’accueil de la Sépaq et site magnifique à l’embouchure d’une rivière.
Changement de garde dans la boîte du camion : c’est maintenant Sahaza qui y accompagne l’infatigable Gaëlle, alors que Alice, dont les cheveux sont passés du brun profond au gris poussière, nous rejoint à l’intérieur. Tout de suite après, petite pause au magnifique phare Macdonald avant de poursuivre le marathon.
Nous arrêtons plusieurs minutes à la chute de la rivière Observation. Cette petite rivière plonge dans un impressionnant canyon qu’elle a elle-même creusé dans les friables roches sédimentaires. Que c’est beau !
Après plus de 150 km de route, nous atteignons notre destination : Vauréal. Ici, nous marchons. Le sentier descend au bord de la célèbre rivière afin de remonter son cours au fond du canyon. Les hautes murailles de calcaire deviennent de plus en plus verticales au fil de notre progression. Nous ouvrons grand les yeux, émerveillés à chaque pas. Au bout du canyon, la chute Vauréal dévale dans un profond bassin en bruyantes et fascinantes éclaboussures.
Nous ne nous contentons pas de regarder et de photographier : nous plongeons dans le sujet, puisque nous avons nos maillots de bain. Nous gardons une certaine distance, mais pataugeons, grimpons et plongeons au pied de la chute. Bonheur !
Après le pique-nique, nous revenons sur nos pas, enchantés. Nous arrivons aux véhicules en même temps que les premières gouttes, puisque le ciel s’est couvert. Tout près, il y a un spectaculaire belvédère qui permet d’admirer la chute sous un autre angle. Malgré notre forte envie de poursuivre l’exploration, nous écoutons la voix de la raison – une fois n’est pas coutume – et prenons la route du retour.
En arrivant à l’intersection vers la grotte de la Patate, notre groupe se scinde. Avec la pluie, le vent a forci et notre amarrage au quai n’est plus vraiment sécuritaire. Alain, Yvan, Benoît et Adélaïde prennent la plus petite voiture, plus agile, afin de rentrer au plus vite. Le reste du groupe poursuit l’aventure avec le camion.
À partir du stationnement, il y a environ 1,5 km à marcher. Une équipe de castors vient de construire un solide barrage sur la rivière, tout un travail et tout un bouleversement pour le secteur.
Nous remontons le lit de la rivière, une marche lente et prudente dans les cailloux. Il y a plusieurs passages à gué, facilités par un petit débit. Après un bon bout, je vois des rubans oranges sur de arbres. Vérification faite, il y a un sentier qui n’existait pas lors de ma visite d’il y a 31 ans et qui mène directement à notre objectif. Il y a aussi des panneaux d’interprétation présentant l’histoire et la cartographie du lieu. Nous n’avons pas de casques et peu de lampes, mais nous entrons quand même.
La caverne de la Patate a été découverte en 1980. Pourtant, l’entrée est très visible, spectaculaire avec son ouverture de 7 m de haut. La première salle, nommée la Cathédrale, est haute et large. C’est splendide.
Plus loin, des affiches interdisent le passage en prévention de la Covid. Comme nous sommes tout fins seuls et formons une seule bulle, nous passons quand même alors que la lumière extérieure n’est qu’un souvenir. Il faut se pencher un peu pour atteindre la deuxième salle, rien de compliqué.
Au milieu de celle-ci, un bassin héberge deux grenouilles. Nous nous installons pour une photo de famille, puis nous éteignons toutes les lampes. L’obscurité est totale, nos prenons un long moment de silenceque personne ne souhaite interrompre. Il faut malgré tout revenir à la lumière, n’ayant visité qu’une petite partie de la vaste caverne. Quelle splendeur !
Bien au sec, nous laissons passer une petite averse avant de revenir par le sentier facile et agréable.
Dernière visite de la journée: l’épave du Wilcox. Ce dragueur de mines converti en caboteur s’est échoué en 1954 et n’a pu être renfloué. Depuis, le temps et les forces de la mer ont fait leur œuvre: le bateau est en ruine, mais la visite est fascinante.
Tout un contraste avec ma première visite à cet endroit en 1990, alors que le même bateau était pas mal moins amoché. Oui, c’est moi sur cette photo, avec mon amie Jacinthe. Nous admirons le paysage à partir de la proue, prouesse maintenant impossible.
Il est déjà tard, nous reprenons la route pour rentrer. C’est long longtemps, le camion se transforme en dortoir et il est près de 20 h quand nous revenons aux bateaux. Ces derniers ont été déplacés pour être moins exposés, mais Atua a subi de légers dommages, heureusement sans impact sur la navigation. La soirée est courte, car nous appareillons demain vers Sept-îles. Nous aurions aimé aller en Minganie, mais ce serait trop incertain comme voyage. De toute façon, nos yeux et nos cœurs sont déjà comblés par Anticosti.