Perdre les pédales

> Aéroport > Montréal – 30 km + 6500 km
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Samedi. Ce matin, je n’ai pas besoin de mon réveil : je le devance de quelques minutes. Quand Enrique se lève, je suis presque prêt, mais lui et moi prenons toujours plaisir à parler ensemble. À 9 h, je suis en route.

Le première partie, urbaine et en descente, est facile en ce samedi matin bien tranquille. En consultant la carte sur mon appareil photo, je trouve facilement le pont au-dessus du Llobregat, un tout petit cours d’eau en cette saison. Peu après, je passe le seuil des 3500 km, ce qui fait de ce voyage le plus long de ma carrière de cyclotouriste.

Je roule un bout de temps sur la digue, un trop long bout de temps puisque je manque l’intersection vers l’aéroport – était-elle indiquée ? – et me retrouve près des plages. Je reviens sur mes pas et trouve enfin l’aéroport et le terminal « 2 », puis la section « B » où je prendrai mon avion. C’était prudent de partir tôt : il est déjà 11 h et j’ai parcouru près de 30 km à cause des détours.

Ensuite, les choses vont rondement : je prépare vélo et bagages, je règle les formalités, je mange un peu et me rends à la salle d’attente pour l’embarquement.

Il me reste du temps sur mon téléphone. Je réussis à rejoindre quelques amis pour les saluer avant l’envol. Le voyage n’aurait pas été une si belle aventure sans leur accueil plus que chaleureux.

Nous nous installons à bord. Comme l’aéroport est vaste, il se passe près de 30 minutes entre le moment où nous commençons à rouler et l’envol comme tel. Il fait très beau alors que nous survolons l’Espagne. Je peux profiter du paysage puisque je suis assis au hublot.

Comme l’appareil est plus ancien, les écrans sont collectifs plutôt qu’individuels, ce qui fait que les passagers ne choisissent pas ce qu’ils voient. J’écris un peu, puis je complète le tri des photos.

Ces voyages en avion sont assez peu palpitants. Comme la plupart des passagers, je sommeille tant bien que mal entre les annonces et les collations. En fin de parcours, je jette un coup d’œil dehors et vois une côte : nous survolons Tadoussac, où je pédalais l’an dernier. Souvenirs…

Nous atterrissons à l’heure prévue et nous nous dirigeons vers les douanes. Dans une grande salle bondée, les nombreux voyageurs font la file dans un labyrinthe. L’attente est longue puisque le personnel est trop peu nombreux, et plusieurs étapes de contrôle se suivent, avec file entre chacune. Accueil bizarre, assez mal fichu…

Dans mon cas, j’ai droit à la totale. J’ai déclaré le montant des achats faits à la suite du vol de Lyon, alors des étapes s’ajoutent avant de récupérer mes bagages.

Mon gros sac m’attends sur le carrousel, mon vélo est avec les bagages hors dimensions, mais celui-ci ne va pas bien : tout est en désordre, le pneu arrière est à plat, la chaîne est débarquée, mais surtout le transporteur a perdu les pédales puisque le sac de transport s’est ouvert. Rien à faire : je devrai rentrer à la maison en taxi.

En attendant, je dépose une réclamation à ce sujet, puis me présente au dernier contrôle. On m’envoie pour une étape supplémentaire : une fouille détaillée. La jeune douanière me fait tout ouvrir, examine les factures, fouille un peu partout dans l’ordinateur et conclut – probablement à raison – que j’ai dépassé le montant d’achats permis. Mais elle comprend les circonstances et me laisse partir sans surcharge.

Je me dirige vers les taxis. À nouveau, il faut affronter une longue ligne d’attente et la course est très chère, avec une surcharge pour le vélo. C’est avec soulagement que j’arrive chez moi, plus de trois heures après l’atterrissage.

Tout est en ordre. Je prends une bonne douche, puis le volant de ma voiture : Jean et Ginette ont rassemblé un bon groupe de nos amis communs pour un souper de fin d’été. Très agréable. Je suis de retour à la maison vers minuit. Je ne m’occupe guère du décalage horaire… mais il est temps de retrouver le confort de mon lit. Je rêve de repartir, mais sans trop d’avions ou de trains…


km jour : 28,3
km total : 3521
départ / arrivée : 9 h 15 / 20 h 45
temps déplacement : 1 : 39
vitesse moyenne : 17,1
vitesse maximale : 34,1

Barcelone

Esplugues de Llobregat (Barcelona)
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Vendredi. Une bonne et longue nuit. Je me lève vers 9 h 30, sans faire de bruit car Enrique profite d’un bon sommeil jusqu’à 10 h 30. Nous déjeunons de concert, nous regardons quelques cartes et je termine le journal avant de me diriger vers la ville pour m’y balader.

Pour m’y rendre, j’utilise le transport en commun. Le tramway passe devant la porte et me mène au métro. Simple. En revanche, j’apprécie le coup de main de Nacha, une dame d’origine salvadorienne, qui m’indique quel ticket choisir et me change un billet, puisque la machine n’accepte pas ma carte de crédit.

En ville, il y a foule, partout, sous la chaleur. Les gens déambulent, se photographient, mangent, boivent, entrent et sortent des commerces qui sont partout… Je suis loin de la solitude du cycliste sur sa monture.

Je me perds là où vont mes pas dans les rues étroites qui tissent ces vieux quartiers bourrés de charme. Selon les conseils d’Enrique, je me dirige vers l’est, plus calme.

Je choisis une visite payante, celle de l’église Santa Maria des Mar, splendeur gothique ayant survécu aux siècles et magnifiquement restaurée. J’y passe du temps et je la photographie à mon goût.

De retour dehors, je vais me balader dans le Parc Ciutadella, avec son étang encombré de chaloupes à rames, je reviens longer le port pour terminer la boucle près de la célèbre cathédrale Sagrada Familia, œuvre mythique de l’architecte Antonio Gaudi. Je ne songe même pas à y entrer, pour cause de foule trop dense. Et je reviens tranquillement à la maison

Ce soir, Enrique cuisine un excellent riz aux légumes et lardons. Je goûte des figues fraîches, un vrai délice, puis nous partageons un bout du dessert que j’ai acheté en chemin, heureusement aussi bon que beau. En soirée, nous partageons images et histoires de voyages sur deux roues avant de nous retirer dans nos quartiers de nuit.

Demain, l’avion et le retour. Et déjà, un fond de nostalgie : j’aurais continué. Bon, une petite pause de quelques mois, avant de repartir, ça peut passer…

Sans stress prévu…

> Esplugues de Llobregat (Barcelona) – 150 km
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Jeudi. C’était un camping anonyme. Seul événement : l’arrosage automatique a humidifié un peu le plancher de la tente. Levé à l’heure habituelle, je pars à l’heure habituelle pour une dernière journée de route. Sera-t-elle anonyme ? En tout cas, je prévois une journée sans stress : Barcelone est trop loin pour être atteinte à vélo, je devrai prendre le train en fin de journée.

Aujourd’hui, le ciel est plus gris que bleu, l’air est embrumé, mais c’est plus confortable côté thermomètre.

En principe, je devrais descendre pas mal, car je suis en montagne et je vais vers la mer. Mais le principe doit attendre encore : je commence avec 5 km de montée en forêt afin de passer un peu au-dessus des 1000 m.

La descente – 700 m d’un coup – vaut largement l’attente. D’abord en forêt, puis sur terrain ouvert, la route s’accroche en balcon au flanc de la montagne jusqu’au creux de la vallée. Fabuleux !

Ensuite, c’est ordinaire. Quelques petites routes et villages, une grosse ville – Montblanc, cité médiévale – à contourner, cartographie attentive pour rester sur le bon chemin.

Je me dirige vers El Vendrell et la mer par la C-51, route plus importante à côté de laquelle une ancienne route a été maintenue, entre autres pour les vélos.

Autour de El Vendrell, je roule quelques kilomètres dans des conditions d’autoroute, plutôt pénibles. Je rejoins la C-31 – ne pas confondre avec l’autoroute C-32 –, passante et désagréable, un long centre d’achats.

Je tente à quelques reprises de rejoindre le bord de mer, sans autre résultat que de perdre du temps : il semble être partout interdit aux vélos.

À Sitges, la route change de caractère. Alors que l’autoroute et le train sont surtout en tunnels, la C-31 serpente comme une route de montagne. Je me laisse tenter, une excellente idée.

Oui, c’est sinueux et étroit, avec beaucoup de circulation et du relief. Mais il s’agit d’une corniche accrochée à la falaise, dominant la mer, magnifique. Régulièrement, je me colle à la bordure de béton pour laisser passer les files de voitures qui sont bloquées quand je roule. Et j’admire la mer et la falaise, paysages grandioses alors que le jour baisse tranquillement.

Après ce bijou, je reviens aux routes normales et commerciales. Je dois veiller à ne pas me tromper de chemin, entrant en ville par des autoroutes. En revanche, je reste plein d’énergie malgré une longue journée et 150 km, un record pour cet été. Étrange de ne pas sentir la fatigue…

Il est 22 h et il fait bien nuit quand j’arrive enfin chez Enrique, mon hôte Warmshowers. Ce réseau de cyclotouristes propose des rencontres entre passionnés, et c’est bien le cas cette fois-ci. Vétérinaire devenu photographe, Enrique a entre autres pédalé la côte est de New-York à la Gaspésie, avec retour par la rivière Hudson, le sud-est asiatique et la Nouvelle-Zélande.

Je suis reçu dans un superbe loft – aménagé par lui-même dans un ancien local commercial – avec de hauts plafonds où pendent quelques vélos, des fenêtres immenses et un mélange intéressant d’objets d’époques et de fonctions très hétéroclites.

Nous passons un petit bout de soirée très agréable, mais nous nous couchons assez rapidement car tous les deux avons besoin de repos.


km jour : 147,8
km total : 3492
départ / arrivée : 9 h 15 / 22 h
temps déplacement : 9 : 26
vitesse moyenne : 15,6
vitesse maximale : 52,3

Les cols brûlants

> Prades (Priorat) – 75 km
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Mercredi. Souhaitant faire une bonne journée, je me lève tôt. La tente est légèrement humide de rosée, elle séchera ce soir. Dès 9 h 15, je suis en route.

C’est frais pour le moment, le ciel est légèrement voilé, mais la chaleur sera de toute évidence au rendez-vous.

La montée d’hier vers le camping est ce matin une descente rapide. En passant à Móra la Nova, j’achète fruits et fromage dans de petites boutiques afin d’avoir l’essentiel pour la journée.

Je roule quelques kilomètres dans la large et confortable vallée de l’Ebre, puis je pars sur de petites routes dont j’espère qu’elles seront intéressantes. Bien vu, mais elles seront aussi très exigeantes, plus encore que ce à quoi je m’attendais.

Si touts les cours d’eau sont bien secs, il y a des arbres résistants à ce climat toujours aride, ainsi que des cultures de vignes et d’oliviers. En après-midi, il fait 39° selon mon thermomètre. Je bois beaucoup d’eau, heureusement disponible aux fontaines.

Les routes sont en excellente condition et très peu fréquentées, ce qui facilite la conduite.

Je traverse une série de petits villages, tous magnifiques, sur des hauteurs et séparés par de creuses vallées. Entre Lloà et Gratallops, la longue montée est si abrupte que je dois arrêter chaque 25 m pour reprendre mon souffle.

Après une jolie crête, je descends à Vilella Baxiat, au pied d’un spectaculaire mur de montagnes surmontées de falaises. C’est le Parc naturel de la Serra del Monsant. Sur des kilomètres, la route monte le long des montagnes, offrant des points de vue incroyables. Je manque d’yeux pour tout admirer ; mon appareil photo est bien sollicité, mais ne peut rendre l’ampleur du spectacle.

En chemin, je suis accompagné des grondements du tonnerre, mais l’orage passe ailleurs. Ça m’aurait mouillé mais rafraîchi.

À partir de l’intersection vers Escaladei, la montée s’apaise et j’arrive à Poboleda, autre splendeur, avant de descendre vers une route un peu plus importante.

Je pensais qu’elle pourrait descendre vers les vallées, mais elle monte constamment : c’est encore un col à plus de 900 m, à nouveau accompagné de gros grondements de tonnerre. Mais quels paysages!

Quand ça redescend un peu, j’arrive au camping de Prades. Il est déjà 19 h, j’ai battu mon record de basse vitesse moyenne et il est temps d’arrêter. Après tout, même si j’ai descendu plus de 1000 m, j’en ai monté plus de 1650.

Je suis dans un gros camping familial, cher et encombré, où je croise beaucoup de monde sans en rencontrer. Après les routines, je m’installe confortablement dans ma tente pour écrire en musique. Demain, ce sera la dernière vraie journée de vélo. J’espère bien en profiter, mais je serais étonné qu’elle soit comparable en splendeur à celle qui achève.


km jour : 76,0
km total : 3344
départ / arrivée : 9 h 15 / 19 h 15
temps déplacement : 6 : 20
vitesse moyenne : 12,0
vitesse maximale : 53,9
camping : 19,50 €

Villages photogéniques

> Tivissa (La Ribera d’Ebre) – 95 km
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Mardi. Mouillée hier soir, la tente est bien sèche ce matin. Avant de quitter, je discute campings et itinéraires avec le proprio, toujours de bon conseil. À 10 h 15, je roule.

Le temps reste gris, plus frais – un peu sous les 30° –, mais aucune menace de pluie n’est en vue. Aujourd’hui, une bonne partie du trajet est connue : après Torre del Compte – l’épicerie est ouverte et j’en profite –, j’entre sur la Via Verda, toujours splendide.

Il y deux nouveautés par rapport à la semaine dernière : un soleil plus généreux, et des mûres prêtes à être dégustées. Sinon, les points de vue sont nombreux. Je prends un peu moins de photos, mais c’est de toute beauté, spécialement dans les gorges de la Canaletes.

La section d’aujourd’hui compte deux bonnes douzaines de tunnels. J’apprécie ma frontale, surtout quand l’éclairage automatique ne fonctionne pas.

Je quitte ce paradis du vélo à l’ancienne gare de El Pinell de Brai, en ruines comme la majorité des bâtiments liés au train. Je ne suis pas encore au village : il faut franchir 6 km et un petit col. Ça reste de toute beauté, tout comme le village que je traverse.

La petite route qui mène à Miravet, le village suivant, est très tranquille. Après une courte montée et un plateau, une longue descente amène sur les bords de l’Ebre. C’est assez spectaculaire : comme souvent, un château domine la place, mais en plus l’église et l’ancien village sont accrochés à un cap qui plonge directement dans l’eau.

Il me faut traverser l’Ebre, mais point de pont ici : c’est plutôt un bac très ancien qui passe d’une rive à l’autre, constitué de deux barques liées par une plate-forme où trois petites voitures sont à l’étroit. Aucune mécanique : tout fonctionne avec le courant et des bras. Système très écolo, efficace et un peu folklorique.

À 17 h, je suis à Ginestar, où un camping est annoncé. Après seulement 75 km, je souhaiterais continuer, mais le prochain camping sur mon itinéraire est au moins à 50 km de routes de montagne, bien trop loin pour le temps disponible. À 17 h 45, je reprends la route, n’ayant jamais trouvé le fameux camping.

Je dois donc m’écarter de mon chemin de plusieurs kilomètres et d’un dénivelé considérable pour me retrouver à Tivissa, autre village très photogénique.

Depuis plusieurs jours, le sol est si durci qu’il est pratiquement impossible de planter des piquets de tente, et ici c’est encore pire car il n’y a pas d’arbre bien situé pour m’y attacher. Je bricole avec une corde coincée entre deux briques, une clôture et des pierres : tout tient quand même.

J’ai des voisins français avec qui parler un peu, mais j’ai besoin de repos, comme leurs enfants, alors nous ne jasons pas trop tard. Luxe suprême : je dispose d’une table pour écrire. C’est bien confortable, malgré la musique aussi bruyante que la grappe de préados. Je termine tôt, ce qui me permet de me coucher tôt et d’envisager une bonne et longue nuit.


km jour : 92,7
km total : 3268
départ / arrivée : 10 h 15 / 19 h 30
temps déplacement : 6 : 15
vitesse moyenne : 14,8
vitesse maximale : 49,5
camping : 11,50 €

Le haut fourneau

> La Fresneda (Teruel) – 120 km
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Lundi. Levé vers 7 h 15, je suis prêt à 9 h. Passant acheter une baguette à l’accueil, j’y croise la jeune Manon, connue la semaine dernière. Évidemment, je passe saluer la famille, toujours aussi sympathique. Je suis donc en route à 9 h 15.

Je roule les premiers kilomètres sur une petite route facile et calme avant de rejoindre la N-232. Là, il y a pas mal plus de circulation, mais un bon accotement. Ça monte régulièrement, avec une petite descente à l’occasion.

Surtout, c’est bien chaud, avec un thermomètre qui se tient entre 30° et 35° toute la journée. Le soleil plombe et mes bouteilles se vident plutôt rapidement même si je ménage mon eau pour me rendre au prochain ravitaillement. En revanche, je profite régulièrement des mûres, délicieuses mais dangereuses avec un plant épineux de partout.

Comme prévu, les paysages sont très beaux et très ouverts : plus je monte, plus la végétation diminue en taille et en verdure. Je longe un bout de temps la large rivière de Cervera, complètement à sec comme pratiquement tous les cours d’eau de la région. Impressionnant.

Vers midi, ça commence à monter plus sérieusement. Après un pont étroit, des lacets, puis un beau petit col comme je les aime. Il n’est ni très haut ni difficile, mais c’est franchement magnifique. Une différence par rapport aux autres cols : tout est sec, il n’y a pas d’eau nulle part. Mais plusieurs automobilistes m’encouragent au passage, un soutien apprécié.

Après un petit plateau et une bonne descente, c’est Morella. Wow ! Juchée sur une bonne colline, la ville est dominée par un énorme château médiéval et cernée d’une impressionnante fortification. Il y a même des sections de ce qui semble être un aqueduc romain. Je refais le plein d’eau à une station service, mais l’épicerie est fermée pour le moment.

J’ai tout le temps d’admirer la ville, car elle est au pied d’une montée de quelques kilomètres. Sur la crête, des éoliennes à perte de vue. Et après, toute une descente ! La route est belle, le vent me pousse et j’y atteins 69,3 km/h, non sans une pensée pour Pierre-Andrea, autre fils de mes amis Jean-Pierre et Diane, qui a récemment chuté en vélo à haute vitesse pour se ramasser à l’hôpital.

Je me rends intact en bas de la côte. Là, la route est en reconstruction, mais ça ne dérange pas puisque l’ancienne est toujours en place, étroite, sinueuse mais bien pavée.

Prochain village : Montroyo. Plein d’eau, bien sûr, mais épicerie fermée. Problème : mes réserves sont basses. Je quitte la N-232 pour la A-1414, une route régionale. Elle commence par une rapide descente, puis un bout de vallée et une bonne montée. Et on recommence. Toujours, les paysages sont magnifiques, mais le temps avance et je m’inquiète pour la bouffe.

À Fuentespalda, un passant confirme mes inquiétudes : c’est jour de fête nationale. Vais-je jeûner ce soir? En attendant, une plus grosse montée, puis une grande descente me mènent dans une autre vallée et à Valderrobres, village magnifique lui aussi.

Toujours, l’épicerie est fermée. En approchant du centre touristique, je croise des gens avec un sac de victuailles. Un gros dépanneur est ouvert : j’y achète l’essentiel.

Le ciel s’est couvert et des averses circulent un peu partout. Je croise l’entrée du camping local, mais je décide de poursuivre jusqu’à celui de La Fresneda, que j’avais bien apprécié. Bon plan : l’accueil est toujours à la hauteur, ma place dans le stationnement est disponible et la pluie n’est pas encore arrivée.

J’ai le temps de tout installer et de manger alors que quelques éclairs illuminent le ciel maintenant bien noir. Ensuite, je suis à l’intérieur pour vaisselle, douche et journal. En revanche, pas de rencontre notable ce soir. Quand tout est complété, je retrouve ma tente, humide à l’extérieur, sèche à l’intérieur, avec délices.


km jour : 119,3
km total : 3176
départ / arrivée : 9 h 15 / 20 h 45
temps déplacement : 8 : 03
vitesse moyenne : 14,8
vitesse maximale : 69,3
camping : 13,65 €

Trois pour le prix d’un

> Càlig (Castellò) – train + 25 km
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Dimanche. Jour de départ. Couchés tard, tous se lèvent tard, évidemment. Ce matin, je prépare tout mon matériel – il s’agit de ne rien oublier – et je fais un envoi de nouvelles et photos sur les plates-formes habituelles. Je confirme également mon rendez-vous de jeudi à Barcelone avec Enrique. Mon amie Virginie est de retour de vacances en Aragon, où j’étais ces derniers jours, et vient de se reconnecter chez elle, dans le Gers. Cette année, nous nous sommes manqués : je pourrai la visiter une prochaine fois.

Les autres gars de la maison sont déjà partis dans une aventure intergalactique virtuelle, il ne sont guère présents sur terre que lors des repas, et encore.

Au menu ce midi : des sardines achetées hier au marché. Ségo et Tom, soutenus par Internet, se lancent dans une complexe opération de préparation. Le résultat est convainquant pour les adultes, mais beaucoup moins pour les enfants.

C’est déjà le temps de se saluer. Je prends la route sous un soleil rayonnant – comme toujours ici – et il fait « frais », à peine 28°.

Ségo m’a imprimé une carte, qui me guide à peu près dans la bonne direction. J’ai quelques hésitations, mais j’arrive à la gare… 10 minutes avant le départ du train. C’est tout juste suffisant pour acheter mon billet – en espagnol – et pour monter à bord. Tout se passe bien, il y a peu de monde et je peux laisser mon vélo tout monté à proximité. Deux heures de pause, bien plus qu’il n’en faut pour compléter le journal. Ce n’est pas cher : moins de 12 € pour me donner deux jours de plus.

Après 45 minutes, le train s’arrête entre deux gares… et ne repart plus, malgré les efforts du personnel. 45 autres minutes, et ils nous indiquent qu’un autre train viendra nous prendre. Quand ce train arrive enfin, une passerelle permet de passer de l’un à l’autre, mais dans un autre wagon. Mon vélo ne passe pas entre les sièges, alors deux employés le prennent en charge pendant que je transporte deux sacoches et la guitare.

Le nouveau train, bien plus petit, est bondé. Je suis donc debout avec mon vélo jusqu’à Castellón. Là, nous descendons et attendons un troisième train jusqu’à 17 h 40. Entre montagnes et mer, de village en village, le trajet jusqu’à Benicarló redevient agréable et confortable. Vive le train, quand il fonctionne !

J’en descends avec deux heures de retard. Heureusement, rien ne presse aujourd’hui, il est encore tôt et je ne suis qu’à 10 km du camping, sans grand dénivelé.

J’arrive donc tôt. L’accueil est chaleureux, mais j’ai peu de contacts avec mes voisins. Je peux ainsi tout terminer assez rapidement et me coucher tôt alors que la fraîcheur s’installe sous une belle lune.


km jour : 26,4
km total : 3056
départ / arrivée : 13 h 00 / 19 h 15
temps déplacement : 1 : 45
vitesse moyenne : 15,1
vitesse maximale : 39,4
camping : 15,00 €

Marché, plage et guitare

Paterna (València)
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Samedi. Un lit dans une maison, c’est quand même confortable. Je profite donc d’une bonne nuit de repos.

Le lever des uns et des autres se fait en ordre dispersé, les amateurs de jeux vidéo ayant veillé tard. Ici, tous les repas se prennent sur la terrasse, à moins qu’il ne fasse trop chaud. Ce n’est pas le cas actuellement, le mercure flirtant plutôt avec les 30° que les 40° habituels en cette saison.

En avant-midi, Ségo, Manina et moi nous rendons au Marché Central de València. C’est une épopée dans les couleurs, les odeurs et les ambiances alimentaires : il y a des fruits, des légumes, des viandes, des fromages, des noix, des poissons, des pâtisseries, etc. C’est varié, appétissant, souvent étonnant. Nous en ramenons de quoi sustenter la famille.

En avant-midi, Ségo, Manina et moi nous rendons au Marché Central de València. C’est une épopée dans les couleurs, les odeurs et les ambiances alimentaires : il y a des fruits, des légumes, des viandes, des fromages, des noix, des poissons, des pâtisseries, etc. C’est varié, appétissant, souvent étonnant. Nous en ramenons de quoi sustenter la famille.

En début d’après-midi, Manina part pour Toulouse avec Guilhem et Maël, avant de rentrer chez elle à Nantes. Les garçons passeront quelques jours avec les parents de leur mère avant de revenir en Corse, où ils rejoindront leurs parents.

Plus tard, toute la famille se rend à la plage de Sagunto. Le sable est blanc et fin, l’eau chaude, les vagues amusantes et la plupart des estivants se font rôtir assez systématiquement. Je passe l’essentiel de mon temps à l’eau, d’abord au large avec Ségo, puis dans les vagues avec Soetkin. Très agréable.

Sur le chemin du retour, nous visitons un peu le València des installations de prestige. Étonnant que cette ville du désert soit si verdoyante : déjà, les romains y avaient construit des aqueducs efficaces toujours maintenus et améliorés.

Ici, les repas se prennent tard, quand la chaleur a un peu baissé. En soirée, Ségo et moi, avec Soetkin, renouons avec guitare et chanson, un de nos plaisirs de longue date. En fin de journée, je reçois un message confirmant mon hébergement pour Barcelone. Je dormirai bien, à nouveau.

Au bout du labyrinthe

> Paterna (València) – 75 km
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Vendredi. Excellent choix pour le camping. J’entendais à peine l’autoroute, pourtant toute proche. Un petit dérangement, quand même : à 5 h pile, le système d’arrosage pour les orangers se met en marche, sans toucher ma tente. Levé à 7 h, je quitte à 8 h pour La Vilavella afin de déjeuner et de refaire mes réserves d’eau, essentielles ici.

Je roule donc pour de bon à partir de 9 h. Le trajet s’annonce complexe car je me dirige vers un nœud d’autoroutes.

En sortant de La Vall d’Uxiò, je m’informe auprès de deux policiers. Je dois simplement suivre la route N-340. C’est assez simple jusqu’à Sagunto, mais pas très intéressant : c’est plutôt plat, les zones cultivées alternant avec les industries et commerces.

Depuis un bout de temps, mon vélo a recommencé à louvoyer quand ma vitesse est entre 20 et 35 km/h. Une inspiration, une correction : les attaches de ma nouvelle sacoche, achetée à Bergerac, ne sont pas très solides, alors je la stabilise avec ma corde à linge. Et ça marche !

Sortir de la ville de Sagunto est épique : il faut emprunter des bretelles d’autoroute puis une voie de service précaire pour enfin émerger à Puçol. Ouf !

À La Pobla de Farnals, je m’arrête pour dîner et écrire, une bonne pause de deux heures alors que la chaleur est à son maximum.

Il ne me reste, en théorie, que 15 km, mais je n’ai aucune carte précise. À Museros, je bifurque vers Montcada, que je rejoins malgré un détour non fléché. Ensuite, je roule à l’estime. Je traverse quartiers résidentiels, industriels, commerciaux, pour aboutir sur un grand boulevard qui redescend vers Valence, cherchant à rejoindre Paterna.

Enfin, un boulevard vers la droite, vers Paterna. Le compteur en profite pour indiquer 3000 km depuis le départ. Mais le boulevard se transforme en autoroute. Je prends la première sortie, vers Paterna, pour me retrouver sur une autre autoroute. Ayoye. À nouveau, je sors au plus vite.

Je suis à Paterna, près d’un grand cimetière, mais je ne sais pas où aller. Après quelques demandes d’informations infructueuses, le tenancier d’une pizzeria me donne une carte de la ville et des indications. Il suffit d’aller vers la Caňada, leur quartier. J’arrive enfin chez mes amis, peu après 18 h.

Tom et Ségolène louent une grande maison blanche entourée de palmiers – l’un d’eux est planté au milieu de la grande piscine –, mais ils déménageront à Lyon dans quelques jour. Ils ont quatre enfants : Arnaud, Yann, Raphaël et la petite Soetkin.

Je ne suis pas le seul invité : Manina Laurence est là avec Guilhem et Maël, fils du frère de Ségo. La piscine est populaire auprès des jeunes, puis le repas auprès de tous. En soirée, les jeunes et Tom sont requis par divers écrans.

Ségo, Manina et moi profitons d’une balade nocturne dans la vieille ville de Valencia, animée et magnifique avec ses édifices anciens. Nous en profitons bien avant de rentrer pour un bon dodo. Auparavant, j’envoie une demande pour un hébergement cycliste à Barcelone. À suivre, mais après une bonne nuit.


km jour : 74,6
km total : 3033
départ / arrivée : 8 h 10 / 18 h 05
temps déplacement : 4 : 49
vitesse moyenne : 15,5
vitesse maximale : 37,9

Les métamorphoses de la CV-10

> Artana (Castellò) – 120 km
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Jeudi. Encore une nuit calme et confortable. Levé quand même tôt, j’ai de belles conversations avec plusieurs voisins. En plus de Nicolas et Nathalie, je rencontre Bruno et Corine, venus d’un village près de l’Isle-Adam, dans l’Oise. Ils ont trois filles de 10 à 3 ans : Manon, Télia et Cassy. Comme Télia aura 7 ans dimanche, je lui chante « C’est à ton tour » à la guitare. Agréable, mémorable.

Je prends donc la route vers 11 h, ayant envoyé au camping La Fresnada les photos de Ian, puisque je n’ai pas son courriel.

Je pars dans la mauvaise direction, vers la mer. Hier, j’étais arrivé de nuit sans veiller aux détails de l’itinéraire. Ça me vaut un joli détour de quelques kilomètres.

Revenu rapidement sur la bonne voie, je vais d’abord vers Cervera, en haut d’une solide montée, et offrant de belles vues. La route poursuit en hauteur avant de traverser un long pont au dessus d’une large rivière… complètement asséchée. La région est franchement aride.

Après Sant Mateu, je roule sur la CV-10 dans une large vallée où les herbes sèches alternent avec les cultures irriguées et les villages. J’y entre régulièrement pour faire le plein d’eau et prendre des pauses à l’ombre.

En arrivant à Cabanes, ma route devient autoroute, ce que ma carte ancienne n’indique pas. Je n’ai d’autre choix que d’entrer en ville. Il y a une épicerie – Yé ! – qui vend de la soie dentaire, denrée rare ici – re-yé ! La mienne était disparue à la gare de Lyon.

En sortant de Cabanes, il y a une piste cyclable aménagée le long de l’autoroute. Parfois un peu difficile à suivre, avec trois petites descentes à 17 % que je n’aurais pas montées sur deux roues, mais en général très fonctionnelle, elle me mène jusqu’à l’intersection vers Eslida et le camping suggéré.

Il est déjà passé 21 h, la nuit tombe, et le camping est à 10 km. Je me choisis donc une orangeraie paisible pour y passer la nuit.


km jour : 119,2
km total : 2959
départ / arrivée : 11 h 15 / 21 h 15
temps déplacement : 7 : 29
vitesse moyenne : 15,9
vitesse maximale : 53,0